Le rapport qui embarrasse Bush
Un texte rédigé par le bureau du député Henry Waxman parle, avec dix-sept exemples à l'appui, d'une politique énergétique taillée sur mesure pour le géant de l'électricité Enron. La Maison-Blanche dément toute collusion d'intérêts.
>>Lire ci-dessous

Retour sur investissement, suite 6/01/2004 Le géant américain du bâtiment et des travaux publics Bechtel (une société d'ingénierie californienne qui, en 1988, avait signé plusieurs contrats avec Bagdad pour la construction d'une... usine chimique à double-usage, a remporté mardi un nouveau contrat portant sur près de 1,8 milliard de dollars pour la reconstruction des infrastructures en Irak, a annoncé l'agence américaine pour le développement international (USAID). Le financement de ce contrat appelé «Irak infrastructure II» attribué pour une période de 24 mois est toutefois sujet à l'approbation du Congrès américain, a indiqué USAID dans un communiqué. Un premier contrat similaire de quelque 680 millions de dollars sur 18 mois avait déjà été attribué à Bechtel en avril 2003. L'un de ses responsables, Riley Bechtel, conseille le président Bush pour l'exportation.
Rappelons que les sociétés ayant soutenu financièrement Doobleyou lors de son élection en 2000 figurent parmi les mieux servies en Irak et en Afghanistan pour les contrats de reconstruction, selon un rapport d'un centre de recherches publié jeudi. Plus de 70 sociétés ayant effectué des dons d'au moins 500'000 dollars au profit de Bush ont obtenu au total 8 milliards de dollars de contrats, annonce le Center for Public Integrity, basé à Washington. Le rapport souligne les relations des entreprises avec l'armée et le monde politique (>>relire le dossier Waxmann). La plupart des contrats n'ont pas donné lieu à un appel d'offres. «Les 10 plus gros contrats pour l'Irak et l'Afghanistan ont été accordés presque tous à des sociétés employant d'anciens hauts responsables politiques ou des personnes ayant des liens privilégiés avec le pouvoir ou avec le Congrès», révèle le rapport. Le géant du pétrole Halliburton, dirigé par l'actuel vice-président Dick Cheney jusqu'en 2000, a remporté le plus gros contrat, d'une valeur de 2,3 milliards de dollars.
Aux dernières nouvelles, Halliburton a tiré presque un quart de ses bénéfices au 3e trimestre 2003 des contrats en Irak accordés sans appel d'offres à l'une de ses filiales, KBR. A elle seule, Kellogg Brown and Root a ainsi réalisé un chiffre d'affaires de 2,3 milliards de dollars, soit un bon de... +80% par rapport à la même période de l'année précédente.
Rappelons qu'en guise de cadeau d'adieux après la nomination de Cheney au gouvernement, Halliburton lui avait offert une prime de 20 millions de dollars.
Vous avez dit retour sur investissement?

- retour sur investissement: toujours plus fort! 30/10/2003 Des sociétés ayant soutenu financièrement Doobleyou lors de son élection en 2000 figurent parmi les mieux servies en Irak et en Afghanistan pour les contrats de reconstruction, selon un rapport d'un centre de recherches publié jeudi. Plus de 70 sociétés ayant effectué des dons d'au moins 500'000 dollars au profit de Bush ont obtenu au total 8 milliards de dollars de contrats, annonce le Center for Public Integrity, basé à Washington. Le rapport souligne les relations des entreprises avec l'armée et le monde politique. La plupart des contrats n'ont pas donné lieu à un appel d'offres. «Les 10 plus gros contrats pour l'Irak et l'Afghanistan ont été accordés presque tous à des sociétés employant d'anciens hauts responsables politiques ou des personnes ayant des liens privilégiés avec le pouvoir ou avec le  Congrès», révèle le rapport. Le géant du pétrole Halliburton, dirigé par l'actuel vice-président Dick Cheney jusqu'en 2000, a remporté le plus gros contrat, d'une valeur de 2,3 milliards de dollars. Bechtel (une société d'ingénierie californienne qui, en 1988, avait signé plusieurs contrats avec Bagdad pour la construction d'une... usine chimique à double-usage), a remporté un contrat d'un milliard de dollars pour réparer des infrastructures en Irak. L'un de ses responsables, Riley Bechtel, conseille le président Bush pour l'exportation.
Aux dernières nouvelles, Halliburton a tiré presque un quart de ses bénéfices au 3e trimestre 2003 des contrats en Irak accordés sans appel d'offres à l'une de ses filiales, KBR. A elle seule, Kellogg Brown and Root a ainsi réalisé un chiffre d'affaires de 2,3 milliards de dollars, soit un bon de... +80% par rapport à la même période de l'année précédente.
Rappelons qu'en guise de cadeau d'adieux après la nomination de Cheney au gouvernement, Halliburton lui avait offert une prime de 20 millions de dollars.
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- Disparition de 4 milliards 25/10/2003 A l'heure où les Etats-Unis et leurs zélateurs cherchent à obtenir la manne internationale, officiellement pour reconstruire l'Irak qu'ils ont renvoyé à l'âge de pierre, la nouvelle fait tache. Quelques 4 milliards de dollars de revenus pétroliers irakiens ont «disparu dans des comptes bancaires opaques gérés par l'Autorité provisoire de la coalition» que contrôlent les Etats-Unis, a affirmé jeudi l'organisation non gouvernementale Christian Aid (>>2). L'ONG, basée à Londres, a publié à Madrid, au premier jour de la Conférence des donateurs pour la reconstruction de l'Irak, une enquête qui, affirme-t-elle, a conclu à l'existence d'un «trou noir financier» dans lequel auraient disparu «4 milliards de dollars de revenus pétroliers». Ces revenus sont intégrés dans un Fonds pour le développement de l'Irak, géré par les Etats-Unis...

- Retour sur investissement, épisode V 21/10/2003 Halliburton, le géant pétrolier dont Dick Cheney était PDG jusqu'en 2000 et qui s'est vu, ô miracle, attribuer sans appel d'offres pour 1,7 milliard de dollars de contrats en Irak, se retrouve aujourd'hui au centre d'une nouvelle polémique aux Etats-Unis. Deux Démocrates, députés à la Chambre des Représentants  Henry A. Waxman (Californie) et John D. Dingell (Michigan)  ont accusé ce groupe d'avoir... gonflé le prix du pétrole en Irak.
Profitons-en pour rappeler que, dans son interview à Meet the Press du 14 septembre, le vice-président Dick Cheney, soupçonné de collusion d'intérêts, a déclaré qu'il n'avait plus «aucun lien financier» avec le géant pétrolier Halliburton. Là où le bât blesse toutefois, c'est que selon un rapport du bureau du sénateur Lautenberg, Cheney a perçu d'Halliburton, au titre de salaire différé, quelque 205'298 dollars en 2001 et 162'392 dollars en 2002. En stock options, le vice-président a aussi empoché 100'000 parts à 54,50 dollars (acquis), expiration le 12/03/07; 33'333 parts à 28,12 dollars (acquis), expiration le 12/02/08, et 300'000 parts à 39,50 dollars (acquis), expiration le 12/02/09. A ces salaires différés et autres stocks options s'ajoutent encore des indemnités de départ d'un montant de 20 millions de dollars qu'Halliburton lui a versés après seulement cinq années de service, et une prime de 1,4 million de dollars versés en liquide en 2001.
Vous avez dit retour sur investissement?
Autre cas intéressant dans le juteux marché de la reconstruction irakienne, le géant du bâtiment et travaux publics étasunien, Bechtel, qui a obtenu quant à lui les dix plus importants contrats en Irak dans son domaine d'activité. Ironie du sort: en 1988, Brechtel avait signé plusieurs contrats avec Bagdad pour la construction d'une... usine chimique à double-usage. Dans l'inventaire remis aux Nations Unies à la fin de l'année dernière, Saddam Hussein citait d'ailleurs Bechtel parmi les fournisseurs de technologie qui ont participé à la mise au point des armes chimiques détenues par le régime.

- Retour sur investissement épisode IV 29/08/2003 Dans son interview à Meet the Press du 14 septembre, le vice-président Dick Cheney a déclaré qu'il n'avait plus «aucun lien financier» avec le géant pétrolier Halliburton, dont il était le PDG de 1995 à 2000, et qui s'est vu attribué par le gouvernement, sans appel d'offres, des contrats pour un montant de... 1,25 milliard de dollars en Irak.
Là où le bât blesse, c'est que selon un rapport du bureau du sénateur Lautenberg, Cheney a perçu d'Halliburton, au titre de salaire différé, quelque 205'298 dollars en 2001 et 162'392 dollars en 2002. En stock options, le vice-président a aussi empoché 100'000 parts à 54,50 dollars (acquis), expiration le 12/03/07; 33'333 parts à 28,12 dollars (acquis), expiration le 12/02/08, et 300'000 parts à 39,50 dollars (acquis), expiration le 12/02/09. A ces salaires différés et autres stocks options s'ajoutent encore des indemnités de départ d'un montant de 20 millions de dollars qu'Halliburton lui a versés après seulement cinq années de service, et une prime de 1,4 million de dollars versés en liquide en 2001.
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Le 23 septembre, le sénateur Lautenberg a officiellement demandé par écrit au sénateur Susan Collins, présidente de la commission des Affaires gouvernementale du Sénat, de tenir des auditions immédiates sur les contrats pour les travaux en Irak.
Rappel: Fin mars dernier, l'armée étasunienne avait attribué le principal contrat de lutte contre les incendies de puits de pétrole en Irak au géant texan Halliburton, dirigée de 1995 à 2000 par l'actuel vice-président, Dick Cheney. Déjà, les soupçons de collusion d'intérêts allaient bon train, surtout que ledit contrat avait été attribué sans appel d'offres. Les services de Dick Cheney avaient même dû affirmer à plusieurs reprises que le vice-président n'était pour rien dans l'octroi du contrat. Hier jeudi, on apprenait que les contrats en Irak, conclus entre Washington et les groupes américains d'énergie et d'ingénierie pétrolière Halliburton Co. et Bechtel Group Inc., sont en fait bien plus importants que les estimations avancées jusqu'à présent. Selon des documents obtenus par le quotidien Washington Post, les contrats de Halliburton avec le Pentagone dépassent ainsi les... 1,7 milliard de dollars, sans compter plusieurs centaines de millions de plus obtenus en vertu d'un accord avec le Corps des ingénieurs de l'armée de Terre américaine. Les précédentes estimations, datant de mai, parlait de contrats à hauteur d'environ 500 millions de dollars. Selon le Washington Post, Halliburton, basé au Texas (sud), est le plus gros client du gouvernement étasunien en Irak, suivi par la société Bechtel, basée en Californie.
Rappelons qu'en guise de cadeau d'adieux après la nomination de Cheney au gouvernement, Halliburton lui avait offert des stock options pour une valeur de 20 millions de dollars. Vous avez dit retour sur investissement?
Accessoirement, notons aussi que Bechtel a signé, en 1988, plusieurs contrats avec Bagdad pour la construction  d'une usine chimique à double-usage en banlieue de la capitale, selon TomPaine.com. Dans l'inventaire remis aux Nations Unies à la fin de l'année dernière, Saddam Hussein citait d'ailleurs Bechtel parmi les fournisseurs de technologie qui ont participé à la mise au point des armes chimiques détenues par le régime.

- Retour sur investissement, épisode III 13/05/2003 Kellogg, Brown & Root, filiale de BTP Halliburton, a obtenu un contrat de 24 millions de dollars pour la distribution d'essence en Irak, a annoncé l'armée américaine. Le Corps d'armée du Génie a précisé que le contrat a été attribué le 4 mai dans le cadre d'un contrat global. Fin mars dernier, l'armée américaine avait en effet attribué le principal contrat de lutte contre les incendies de puits de pétrole en Irak au géant texan Halliburton, dirigée de 1995 à 2000 par l'actuel vice-président, Dick Cheney. Déjà les soupçons de collusion d'intérêts allaient bon train, surtout que ledit contrat avait été attribué sans appel d'offres. A l'époque, l'administration Bush avait caché l'ampleur du mandat. Dans une lettre adressée à Henry Waxman, membre démocrate de la Chambre des représentants (qui avait déjà dénoncé la collusion d'intérêts entre les pétroliers et la Maison-Blanche), le Corps du génie de l'Armée de terre a ainsi récemment révélé que le contrat en question comprenait non seulement l'extinction des puits en feu, comme annoncé, mais aussi «la gestion d'installations et la distribution de produits». M. Waxman a écrit mardi au général Robert Flowers, qui appartient au Corps en question, soulignant que le contrat d'Halliburton avait «une portée considérablement plus large que ce que l'on en savait auparavant». «Je suis préoccupé par le fait que la réticence de l'administration à fournir une information complète sur ce contrat, et sur d'autres en Irak, a pu priver le Congrès et l'opinion d'informations importantes», expliquait M. Waxman. L'élu estimait aussi que la proposition du Corps de remplacer l'actuel contrat du géant des services pétroliers par un autre de longue durée contredit les déclarations de Washington selon lesquelles le pétrole de l'Irak appartient au peuple irakien.
Les services de Dick Cheney avaient affirmé à plusieurs reprises que le vice-président n'était pour rien dans l'octroi du contrat. Rappelons tout de même qu'en guise de cadeau d'adieux après la nomination de Cheney au gouvernement, Halliburton lui avait offert des stock options pour une valeur de 20 millions de dollars. Vous avez dit retour sur investissement?

- Retour sur investissement. Episode II 07/05/2003 Fin mars dernier, l'armée américaine avait attribué le principal contrat de lutte contre les incendies de puits de pétrole en Irak au géant texan Halliburton, dirigée de 1995 à 2000 par l'actuel vice-président, Dick Cheney. Déjà les soupçons de collusion d'intérêts allaient bon train, surtout que ledit contrat avait été attribué sans appel d'offres. Mais il semble aujourd'hui que l'administration Bush a aussi caché l'ampleur du mandat confié à Halliburton. Dans une lettre adressée à Henry Waxman, membre démocrate de la Chambre des représentants (qui avait déjà dénoncé la collusion d'intérêts entre les pétroliers et la Maison-Blanche), le Corps du génie de l'Armée de terre vient en effet de révéler que le contrat en question comprenait non seulement l'extinction des puits en feu, comme annoncé, mais aussi «la gestion d'installations et la distribution de produits». M. Waxman a écrit mardi au général Robert Flowers, qui appartient au Corps en question, soulignant que le contrat d'Halliburton avait «une portée considérablement plus large que ce que l'on en savait auparavant». «Je suis préoccupé par le fait que la réticence de l'administration à fournir une information complète sur ce contrat, et sur d'autres en Irak, a pu priver le Congrès et l'opinion d'informations importantes», explique M. Waxman. L'élu estime aussi que la proposition du Corps de remplacer l'actuel contrat du géant des services pétroliers par un autre de longue durée contredit les déclarations de Washington selon lesquelles le pétrole de l'Irak appartient au peuple irakien.
Les services de Dick Cheney avaient affirmé à plusieurs reprises que le vice-président n'était pour rien dans l'octroi du contrat. Bien sûr, Bien sûr. Rappelons tout de même qu'en guise de cadeau d'adieux après la nomination de Cheney au gouvernement, Halliburton lui avait offert des stock options pour une valeur de 20 millions de dollars. Vous avez dit retour sur investissement?

  Halliburton et Cheney: premier retour sur investissement 26/03/2003 Un élu démocrate à la Chambre des représentants américains, Henry Waxman (qui avait déjà dénoncé la collusion d'intérêts entre les pétroliers et la Maison-Blanche), s'est indigné mercredi dans une lettre au Génie militaire des conditions d'attribution d'un important contrat en Irak à une filiale du groupe pétrolier Halliburton. L'armée américaine a en effet attribué le principal contrat de lutte contre les incendies de puits de pétrole en Irak à une filiale du groupe américain Halliburton, et ce sans appel d'offres. Rappelons qu'Halliburton a été dirigé jusqu'en 2000 par l'actuel vice-président, Dick Cheney. Et qu'en guise de cadeau d'adieux après la nomination de Cheney au gouvernement, Halliburton lui avait offert des stock options pour une valeur de 20 millions de dollars. C'est ce qu'on appelle, en jargon économique, un retour sur investissement.

Une enquête du quotidien suisse 24 Heures (18 janvier 2002)

ÉTATS-UNIS:  REBONDISSEMENT DANS L'AFFAIRE ENRON

Le rapport qui embarrasse Bush

Un texte rédigé par le bureau du député Henry Waxman parle, avec dix-sept exemples à l'appui, d'une politique énergétique taillée sur mesure pour le géant de l'électricité. La Maison-Blanche dément toute collusion d'intérêts.

JEAN-COSME DELALOYE

Article
paru dans
:
Le Courrier
14 août 2003
 

  Comment la Maison-Blanche
cache le réchauffement du climat

Selon le député américain
Henry Waxman , le clan Bush a pris l'habitude de fausser les études scientifiques des agences gouvernementales. Notamment pour nier les effets des gaz à effet de serre.

PAR MANUEL GRANDJEAN
L'homme est un cauchemar pour l'Administration Bush. Député démocrate de Californie, spécialiste des questions d'énergie, Henry Waxman n'a de cesse de dénoncer les magouilles de la Maison-Blanche. En janvier 2002, il avait démontré comment la politique énergétique des USA avait été taillée sur mesure pour le géant de l'électricité Enron. En mai de cette année, il accusait le groupe d'ingénierie pétrolière Halliburton - dirigé jusqu'en 2000 par le vice-président Dick Cheney - d'avoir déjà gagné près de 500 millions de dollars en deux ans grâce à des projets liés à l'Irak. Ceci avant même que le pays soit occupé par les troupes de Washington.
Le 7 août, le député Waxman lançait une nouvelle bombe dans les jambes de George W. Sous le titre anodin de «Politiques et science dans l'Administration Bush (>>Lire rapport pdf)», le rapport produit par son bureau relève toutes les interventions de l'actuel gouvernement des Etats-Unis pour manipuler les évaluations scientifiques et déformer ou censurer leurs conclusions. «Ces actions», explique Henry Waxman, «vont beaucoup plus loin que les réajustements ordinaires qui accompagnent le changement d'occupant à la Maison-Blanche.»
À qui ça profite
La prise de contrôle de la science par le clan Bush touche un très large éventail de sujets. Les limiers de Waxman en ont répertorié pas moins de vingt et un: de la prévention des maladies sexuellement transmissibles à la sauvegarde des caribous de l'Alaska, en passant par la pollution de l'eau par l'agriculture ou l'industrie. Un point commun relie cependant tous ces sujets, écrit Henry Waxman: «Les bénéficiaires des manipulations scientifiques sont tous d'importants supporters du président», que ce soit des conservateurs sur les plans social et moral ou de groupes industriels.
Pour les premiers, l'Administration Bush a notamment réussi à influer sur la communication de l'agence fédérale pour le contrôle et la prévention des maladies. Contre toute évidence scientifique, celle-ci met aujourd'hui en cause l'efficacité du préservatif contre la propagation du sida et favorise une politique basée sur la seule abstinence. Dans le même style, les politiciens conservateurs sont parvenus à faire en sorte que l'Institut national continue à insinuer qu'un lien existe entre l'avortement et le cancer du sein, alors que, médicalement, l'inexistence de cette relation est prouvée depuis au moins cinq ans.
Quant aux consortiums industriels proches du pouvoir, ils bénéficient des entorses à l'exactitude scientifique dans d'autres domaines. Le Département de l'agriculture, par exemple, exige ainsi que toute communication scientifique sur les «sujets sensibles» lui soit soumise avant publication. Soit: «Les méthodes agricoles qui peuvent avoir des conséquences négatives sur la santé et l'environnement». On s'en doute, ce passage obligé par la bureaucratie politique n'a pas pour but de mieux diffuser l'information...

Les experts du président
Selon Waxman, la Maison-Blanche utilise encore une autre technique pour inhiber le travail des savants. Elle nomme au sein des comités d'experts des personnes qui défendent les intérêts adéquats. Ainsi, en août 2002, le gouvernement a remplacé quinze membres sur dix-huit du comité d'experts sur la santé environnementale. Les nouveaux venus ont de faibles références scientifiques mais ils cultivent en revanche des liens très étroits avec l'industrie.
La question du réchauffement climatique est évidemment un sujet crucial. Lorsque George W. Bush avait rejeté le Protocole de Kyoto sur les émissions de gaz à effet de serre, il avait promis que «la politique de l'Administration concernant l'évolution du climat sera fondée sur la science». En fait, le président s'est efforcé de forger la science au feu de sa politique.
En juin dernier, l'Agence nationale pour la protection de l'environnement (EPA) publiait un rapport présenté comme le document le plus complet jamais produit aux Etats-Unis. Le texte, cependant, est totalement muet sur le réchauffement climatique. Cette absence serait restée inexplicable, si une fuite ne s'était produite. Dans le New York Times du 13 juillet, un ancien de l'EPA, Jeremy Symons, explique ce qui s'est passé.

On censure les rapports
Une première version du rapport comprenait bien une section sur le réchauffement climatique. Mais les services de la Maison-Blanche ont fait savoir à l'agence qu'ils exigeaient des «corrections majeures» du texte et qu'aucune modification ne serait permise après leur intervention. Finalement, les scientifiques de l'EPA ont préféré supprimer toute la section plutôt que de cautionner des informations scientifiquement non crédibles. L'intrusion de la politique dans leur champ d'activité fait frémir plus d'un scientifique étasunien. La prestigieuse revue «Science» s'est inquiétée en janvier dernier de l'«invasion par l'Administration Bush de secteurs autrefois protégés contre ce type de manipulations». Même un ancien administrateur de l'EPA, en poste sous les présidences de Nixon et de Ford, est sorti du bois pour témoigner que jamais, à cette époque, la Maison-Blanche ne s'était permise de travestir la réalité.
«La population dépend d'agences fédérales pour promouvoir la recherche scientifique et développer des politiques fondées aptes à protéger la santé et le bien-être de la nation», explique Henry Waxman. L'indépendance de la recherche jouait donc un rôle capital dans l'exercice de la démocratie. «Aujourd'hui, l'Administration Bush a faussé cette perspective», estime le député californien. Au détriment de la communauté scientifique des Etats-Unis qui perd sa crédibilité. Au détriment également de la population de la planète, soumise aux effets d'un réchauffement climatique nié contre la science par le pays qui produit à lui seul plus d'un quart des gaz à effet de serre.

Qui est qui?
-Kenneth Lay: PDG d'Enron. Ami du président Bush. Enron et M. Lay ont donné quelque 2 millions de dollars à Bush depuis 1993 pour ses campagnes.
-National Energy Policy Development Group (NEPDG): structure informelle mise sur pied le 29 janvier 2001 par Dick Cheney pour élaborer une politique énergétique. Le 16 mai 2001, cette task force publie un rapport recommandant une augmentation de la production de charbon et encourage les technologies d'extraction de pétrole et de gaz.
-Lawrence Lindsay: conseiller économique de Bush et membre de la task force sur l'énergie. Ancien consultant d'Enron, il aurait reçu l'an dernier 50 000 dollars (82 000 francs) du conglomérat.
-General Accounting Office (GAO): office chargé de l'information du Congrès. Demande depuis juin au vice-président des informations sur la composition de cette task force ainsi que sur les rencontres qu'elle a pu avoir avec des représentants des industries du pétrole, du charbon et du gaz. Dick Cheney refuse de s'exécuter.
-Henry Waxman: représentant démocrate de Californie, spécialiste des questions d'énergie. Ce dernier a envoyé le 16 janvier une nouvelle lettre à Dick Cheney demandant des éclaircissements sur les liens entre l'administration Bush et Enron.

Henry Waxman défie une fois de plus l'administration Bush. Dans un rapport qu'il a fait parvenir mercredi soir à 24 heures (lire le format pdf, 67ko), le député démocrate de Santa Monica (Californie) fait de nouvelles révélations dans l'affaire Enron. Il y décrit ce qu'il considère être une politique énergétique taillée sur mesure pour le géant de l'électricité mis en faillite le 2 décembre 2001. Conclusions d'un texte qui n'a pas de valeur légale mais qui, selon l'assistante de M. Waxman, hier à Washington, «doit permettre de soulever de nouvelles questions»: dix-sept points de convergence entre les demandes émises par Enron et les recommandations de la task force sur l'énergie, de Dick Cheney.

Parmi les mesures préconisées: la privatisation de l'électricité. Henry Waxman rappelle avoir reçu une lettre du directoire d'Enron le 20 septembre 1999. Extrait: «Enron demande instamment au Congrès de passer une loi sur la dérégulation des marchés de l'électricité.» Waxman rappelle également que Kenneth Lay, président d'Enron et ami de Bush, s'est prononcé le 15 mai 1996 devant le Congrès en faveur d'une telle mesure. Le 17 mai 2001, la task force rend son verdict: il faut privatiser l'électricité. Projet indien Autre exemple de collusion selon Henry Waxman: le soutien du gouvernement pour les projets énergétiques en Inde. Le député rappelle qu'Enron possède 65% des actions dans une installation de gaz naturel estimée à 3 milliards de dollars là-bas. A fin 2000, l'Etat indien du Maharashtra, seul client de l'installation, refuse, à la suite d'une dispute contractuelle, de payer l'énergie qu'il consomme. Enron demande un arbitrage le 12 avril 2001. Un mois plus tard, comme l'écrit Waxman, la task force préconise une collaboration avec l'Inde pour développer sa production de gaz et de pétrole.

Constatant les liens étroits entre Enron et l'administration Bush (le conglomérat a donné plus de 3,3 millions de francs au président deuis 1993 (lire 24 heures des 13 décembre 2001 et 10 janvier 2002), Henry Waxman demande, dès avril 2001, des explications à Dick Cheney. Quel rapport entre le géant de l'électricité et la task force sur l'énergie? Pas de réponse. Mutisme de Cheney L'Organe d'information du Congrès (GAO, voir calepin) décide alors de s'en mêler. Il souhaite obtenir des renseignements sur la composition de la task force ainsi que sur les listes de présence aux réunions de celle-ci. Nouveau refus vice-présidentiel. Face à l'insistance d'Henry Waxman, le bureau de Dick Cheney finit, le 3 janvier dernier, par admettre six meetings informels entre officiels de la Maison-Blanche et représentants d'Enron. Mais Waxman n'en démord pas et renvoie deux lettres (les 8 et 16 janvier) demandant plus de précisions à Dick Cheney sur ses rapports avec Enron. Hier, lors du point presse de la Maison-Blanche à Washington, Ari Fleischer, porte-parole du président Bush, a rejeté à maintes reprises les conclusion du rapport d'Henry Waxman: «Il y a plusieurs choses qu'Enron souhaitait obtenir qui ne sont pas inclues dans les recommandations de la task force. Les points retenus le sont parce qu'ils représentaient la meilleure politique énergétique pour le pays.» Et d'ajouter: «L'enquête qu'a suggérée M.Waxman (...) est un gaspillage d'argent public.»

Quant au refus du bureau du vice-président de dévoiler des informations sur la task force à l'organe du Congrès qui envisage aujourd'hui une action en justice pour les obtenir ? Ari Fleischer l'explique par le besoin de garder une certaine confidentialité sur les débats.