Vers le lynchage de Bachar al-Assad ?


26/08/2013 Nous avons encore en mémoire les images atroces de Muammar Ghadafi se faisant sodomiser au bâton par les valeureux rebelles de Sarko et BHL avant son exécution. Nous avons encore en mémoire la franche hilarité qu’avait suscité la chose chez Hillary Clinton: «We came, we saw, he died ! Ha ha ha ha ha ha ha ha ha ha ha ha ha ha». Aujourd’hui, place à Bachar al-Assad donc, dont on sait grâce aux fines analyses de Libé, du Monde, du Figaro et de toute la presse-Système du Bloc atlantiste en général, qu’il est vraiment très très très méchant face à aux rebelles bisounours de la «so call» révolution. Bien sûr, l’attaque chimique dont on l’accuse est à l’évidence un parfait montage (les Russes en ont fourni la preuve) dans la droite ligne des armes de destructions massives irakiennes, ou des faux bombardements aériens que Ghadafi étaient accusés d’avoir lancés contre son peuple (justifiant l’attaque de la coalition) et qui n’ont jamais eu lieu. Mais à vrai dire : on s’en fout ! Les propagandistes du Bloc occidental savent bien qu’une fois la guerre lancée, plus personne ne se souciera du pourquoi ni du comment, et encore moins quand elle sera terminée. Alors attachez vos ceintures ! C’est peut-être reparti pour un énième vertueux massacre.

Le JT de France 2 comme baromètre
Plus encore que les éditos au garde-à-vous du Monde, de Libé ou du Figaro, le JT de France 2 est LE baromètre infaillible de la propagande en marche dans les rédactions des médias-Système. Et le JT de dimanche soir 26 août, avec une interview du premier-ministre français sur fond de vraie-fausse attaque chimique à Damas, valait son pesant de petites résolutions foireuses au Conseil de sécurité.

- Marie Drucker: La France doit déployer des forces ?
- Jean-Marc Ayrault: Nous avons une exigence c’est que la Commission d’enquête de l’ONU puisse faire son travail rapidement pour que la vérité soit établie.
- M.D.: Mais la vérité il semble qu’on la connaisse.
- J.-M. A. : Il s’avère que c’est sans doute et pratiquement certainement le régime de Bachar al-Assad qui a utilisé l’arme chimique contre son propre peuple. Une fois cette Commission d’enquête terminée nous attendons de la Communauté internationale une décision ferme, une décision claire. Le Conseil de Sécurité se réunira, la Communauté internationale ne peut pas laisser faire ce crime contre l’humanité.

Du côté des médias, on commence donc à s’impatienter.
Lorsque Marie Drucker proclame, un brin agacée : «Mais la vérité, il semble qu’on la connaisse !», elle estime clairement qu’il est temps de passer à l’offensive militaire sans s’encombrer d’une vérification des faits. Vérification d’autant plus inutile, suggère-t-elle implicitement, «qu’on est tous d’accord pour dire depuis le départ que c’est Bachar le méchant. Alors pourquoi vérifier. Et en plus, vous imaginez dans quelle merde on se retrouverait si on découvrait que c’est des free-lance de la rébellion
payés par l’Arabie Saoudite, genre les fous d’al-Nosra, qui ont gazé leurs potes pour accélérer les choses ? Hein, Jean-Marc, t’imagines la merde ? Hein ? »
De son côté, J.-M.-A ne veut pas fâcher la speakerine du jour et, après un bref passage obligé sur la vertueuse exigence d’une enquête onusienne qu’il souhaite toutefois «rapide» (c’est-à-dire bâclée), il donne le résultat que ladite enquête devra nécessairement produire. Et notre fumeux premier-ministre d’attendre donc de la Communauté internationale une décision ferme, claire ; bref des bombes car la Communauté internationale (c’est-à-dire les USA, Israël, l’Europe à genoux et quelques princes défoncés aux pétrodollars), ne peut décidément «pas laisser faire ce crime contre l’humanité».
Satisfaction humide de Marie Drucker, fière d’avoir suscité une déclaration aussi héroïque chez son interlocuteur. Non mais !
Accessoirement, et histoire de couper l’herbe sous le pied d’enquêteurs qui pourraient être tentés de faire leur travail (allez savoir….), le ministre britannique des Affaires étrangères, William Hague, a déclaré le même soir que les preuves d'une attaque chimique du régime de Damas en Syrie «
pourraient avoir été détruites» par un bombardement.
En revanche, pas un mot sur les preuves fournies par les Russes au travers deux images satellites qui prouvent que les
missiles chargés de produits chimiques ont été tirés de la localité sous contrôle rebelle de Douma.
Affaire classée donc, avant d’avoir été ouverte.

Et toujours cette fascinante inculpabilité
Avec la même «inculpabilité» qui faisait dire à Madeleine Albright que le meurtre d’un demi-million d’enfants irakiens était un prix acceptable à payer pour faire chuter Saddam Hussein ; avec la même  «inculpabilité» qui faisait glousser Hillary Clinton à l’annonce du lynchage de Ghadafi ; avec cette même inculpabilité qui faisait dire à Condoleezza Rice que le cri des civils libanais écrasés sous les bombes israéliennes (en 2006), était «les douleurs de l’enfantement d’un nouveau Moyen-Orient», voici donc l’Occident prêt à remettre le couvert avec une petite boucherie supplémentaire, en Syrie cette fois, histoire de terminer le travail.
Et qu’importe si à ce jour seuls les glorieux rebelles du vertueux Occident ont effectivement utilisé des armes chimiques, faisant de surcroît régner la terreur partout où ils contrôlent le pays.

La marche inéluctable vers l’enfer
Bon comme toujours depuis des mois, ne reste comme frein éventuel aux délires paroxystiques du Bloc atlantiste que la raison de Pékin et celle de Moscou. En cas de réunion du Conseil de Sécurité pour décider de l’attaque à venir, il est probable que les deux capitales asiatiques opposeront leur veto aux désirs morbides de la France, des US et de la perfide Albion.
Mais la marche vers le pire semble inéluctable, et nos vertueux protagonistes ont d’ailleurs d’ores et déjà dit qu’ils étaient prêts à agir
en dehors de toute résolution de l’ONU, sur le modèle de la guerre conduite par l’OTAN au Kosovo en 1999. Pensez donc ! Leur raison est si haute, si noble, si pure et au-dessus de tout soupçon qu’elle ne saurait être bridée ni par le droit international ni par la vérité. Au-dessus vous dis-je !
Dès lors, on voit mal ce qui pourrait encore bloquer la machine, d’autant que cette accélération est destinée à pallier aux revers subis par les insurgés qui sont tout simplement en train de perdre la guerre face à l’armée loyaliste.
Pour le plus probable, nous assisterons donc à une tentative d’assassinat de Bachar et de sa direction à coups de missiles, avec l’ambition de favoriser alors une victoire aussi rapide qu’hasardeuse des
mercenaires du Bloc atlantiste. Sauf qu’au vu des rivalités qui opposent les différentes factions aux prises en Syrie, on peut dès lors parier sur 10 ans d’enfer dans le pays.
Or ce scénario, déjà foireux par essence, implique aussi une passivité totale de l’Iran, de la Russie et de la Chine qui ont pourtant des intérêts stratégiques en Syrie. Et là,
rien n’est gagné.
Car si un seul des protagonistes en question décidait de relever le gant, alors bien malin qui pourrait dire la profondeur des enfers dont le vertueux Bloc atlantiste aura ainsi ouvert les portes.
Au vu de ce qui précède, la seule question qui reste donc ouverte est de savoir s’il reste aujourd’hui un esprit sain – enfin, disons plutôt quelqu’un de sain d’esprit –, à la direction du Bloc, pour envisager un tant soit peu sérieusement les conséquences potentiellement dévastatrices de son hystérie.
Si c’est le cas qu’il se manifeste.
Et vite.