Révolution égyptienne : la cruauté du miroir
10/02/2011 Sans surprise, la révolution égyptienne est un miroir terrible pour
la gouvernance occidentale. Un miroir où, entre confusion US et lâcheté
européenne, se reflète surtout la petitesse et la frilosité d’une élite
occidentale dépassée par l’Histoire, incapable de la moindre audace décisive et
préférant trahir toute honte bue, dans l’angoisse de l’inconnu, les idéaux dont
elle se gargarise d’être pourtant le héraut.
Cacophonie US
Oh bien sûr, Glamour-Obama (ci-après
G-BHO pour faire smart) campe parfaitement son rôle de chef du monde-libre
en déclamant, le menton levé, qu’il faut une «transition
immédiate, une transition ordonnée» en Egypte. Mais la contradiction
évidente dans les termes n’échappe pas au clan Moubarak qui s’accroche. Une
ambigüité d’ailleurs renforcée par les déclarations tonitruantes du
très suspect
envoyé spécial US en Egypte, Frank Wisner, qui,
lié au clan Moubarak
par ses affaires, a clairement affirmé que Moubarak devait rester.
Cette situation effarante où l’on voit un envoyé spécial US contredire la
position du président US himself en dit long sur la marge de manœuvre réelle de
G-BHO au milieu des guerres d’influences qui ravagent l’administration
américaine, et notamment grâce à l’action du lobby sioniste.
Résultat : alors que Wisner aurait dû être immédiatement congédié, la
Maison-Blanche a, là encore, envoyé un message pour le moins confus en se
distanciant des propos de Wisner, tout en lui
renouvelant sa confiance
dans le même élan désordonné.
G-BHO peut donc bien continuer à lever son élégant menton pour réclamer une
transition «ordonnée et immédiate», on ne voit pas vraiment dans ses conditions
qui il représente, à part lui-même peut-être…
L’UE, as usual aux abonnés absents
A la cacophonie américaine s’ajoute bien sûr la veulerie rampante d’une
Europe soumise et paniquée par l’accélération de l’Histoire et qui, hormis
quelques déclarations à usage purement médiatiques, en est bien vite revenue à
la molle exigence d’une «transition
ordonnée»,
c’est-à-dire qui permette le
maintien en place de Moubarak,
et sans doute à terme la reconduite de son pouvoir totalitaire sous d’autres
formes,
sous d’autres têtes,
mais toujours au service de la politique pro-israélienne d’un Système
américano-occidentaliste dont les dictatures les plus insoutenables ont toujours
servi les intérêts et/ou la stabilité.
Une lâcheté largement encouragée en France par le Parti crypto-sioniste des
salonards parisiens qui, après avoir poussé des cris d’orfraie pour appeler au
renversement du régime iranien il y a quelques mois, disent
d’une même voix
toute la crainte que leur inspire finalement la démocratisation de l’Egypte. A
vomir.
Le flamboyant courage égyptien
Ceux qui voient de loin la situation égyptienne peineront à imaginer la
somme de courage qu’il a fallu et qu’il faut encore au peuple égyptien pour
affronter la machine de répression Moubarak.
Tortures, assassinats, arrestations arbitraires, enlèvements, disparitions et
intimidations sont le lot quotidien des opposants au régime depuis plus de 30
ans maintenant.
La sodomie à l’aide d’une matraque est presque devenue un rituel dans les
commissariats et les prisons égyptiennes.
Au début des manifestations, la première mesure de Moubarak a été de retirer la
police des rues pour laisser le champ libre aux pillards et tenter ainsi de
monter une partie de la population contre les manifestants.
Deuxième étape, des policiers en civils épaulés par des hordes de casseurs et de
voyous à la solde de Moubarak, «connus
sous le nom de vandales en Egypte», ont ensuite été lâchés contre les
manifestants. C’est là que nous avons assisté à cette vague de violence qu’une
partie de la presse-Pravda s’est bornée à présenter comme un affrontement entre
des antis et des pro-Moubarak. En réalité, ces violences étaient parfaitement
organisées et d’ailleurs, devant le tollé suscité par les morts, ces fameux
pro-Moubarak ont comme par enchantement disparu des rues…
Troisième étape : l’annonce de l’ouverture d’un pseudo dialogue, de la mise en
place de pseudos-réformes et d’une pseudo-transition devaient délégitimer la
poursuite des manifestations.
Mais trente ans de rage contenue ne s’étouffent pas avec des promesses qui
n’engagent toujours, comme chacun le sait, que ceux qui y croient.
Et le peuple égyptien
n’est pas dupe
et l’ampleur des manifestations ne cesse de croître, y compris dans les
zones rurales
désormais.
La «transition ordonnée» est une injure
En ce moment historique, la «transition
ordonnée» voulue par l’Occident n’est au final qu’une injure de plus faite à
l’âme de ce peuple magnifique !
Dans un immense cri de rage, un sursaut salvateur, un otage se libère de ses
chaînes en hurlant, le corps ensanglanté et le visage tuméfié par les coups ! Et
l’on voudrait qu’il se recouche dans le silence de son cachot, encore un moment,
le temps que l’on parlemente un peu avec son tortionnaire pour le convaincre de
lâcher prise ? Foutaise !
Les Egyptiens ont pris leur destin en mains, se battent, sûrs de leur droit, de
la justesse de leur cause.
A cet égard, ils sont déjà libres. Et ce n’est pas à l’Occident de négocier leur
libération selon des modalités arrangeantes pour lui.
Coquille
vide,
l’Occident ne fournit plus la réponse.
Alors à ce peuple d’Egypte héroïque, nous disons notre admiration, notre
respect, notre douleur aussi.
Nous leur disons surtout : « Tenez bon ! »