«Goulag électronique globalisé» ? Yes we must !
06/08/2013 Il y a comme cela des moments où le religieux ose renouer
avec son essence révolutionnaire en éclairant le débat séculier avec
toute la clairvoyance d’une inspiration venue «d’en-haut». L'archiprêtre
de l'Eglise orthodoxe russe, Vsevolod Chaplin, s’est ainsi félicité de
l’asile politique accordé par Moscou à l’ex-agent de la CIA Edward
Snowden, soulignant que ses révélations sur le fameux
programme de surveillance
de la NSA, allait «aider à
empêcher la mise en place d’un goulag électronique globalisé» («help
prevent the establishment of a global electronic prison camp»). Mais
le Système n’a pas dit son dernier mot et, alors qu’Obama met son veto
aux auditions anti-NSA, tout notre petit monde-libre s’est mis au
garde-à-vous ordonné par Washington pour une énième alerte terroriste
globale à grand spectacle. The
show must go on, et le «goulag
électronique globalisé» aussi.
Décryptage d’en-haut
Dans notre fameux monde-libre, on peut désormais mesurer l’importance
d’une information au black-out dont elle fait l’objet par les rampants
de la presse-Système. Et à cet égard, la prise de position de l’Eglise
orthodoxe russe doit donc absolument retenir toute notre attention
puisqu’elle n’a été reprise par aucun «grand» média du Bloc atlantiste.
Que nous dit
Vsevolod Chaplin ?
Tout d’abord, il salue à raison
«l’indépendance» dont a fait preuve la Russie en offrant l’asile
politique à Edward Snowden sans céder aux menaces de Washington.
Indépendance à laquelle ont par ailleurs renoncé les
caniches européens
comme nous le savons.
L'ecclésiastique russe relève ensuite que les révélations de Snowden
confirment l'existence d'un problème pernicieux discuté par les
chrétiens orthodoxes «depuis de
nombreuses années» : à savoir l’émergence d’une nouvelle forme de
totalitarisme à travers la mise en place «d'un
camp de prisonniers électronique mondial».
Et Vsevolod Chaplin de décrire ensuite le processus avec une grande
lucidité: «D'abord, ils rendent
les personnes dépendantes de moyens de communication très pratiques. (…)
Les propriétaires économiques et politiques de ces services en retirent
alors un énorme et terrifiant pouvoir dont ils ne résistent pas à faire
usage pour contrôler les individus. (…) Un tel contrôle s’avérera
finalement beaucoup plus strict que celui de tous les systèmes
totalitaires connus du XXe siècle.»
Pavlov au Vatican
La déclaration de l’archiprêtre est intéressante à plus d’un titre.
L’Eglise orthodoxe est en effet une institution qui peut se prévaloir
d’un poids considérable en Russie, et sa prise de position renforce donc
la position de Poutine au point qu’elle limite d’autant sa marge de
manœuvre en lui interdisant tout retour en arrière.
On peut en déduire au premier chef que dans l’affaire Snowden, la crise
entre Moscou et Washington ira à son terme.
Accessoirement, cette prise de position de l’Eglise orthodoxe questionne
inévitablement la position du Vatican dont le silence est assourdissant
sur un dossier qui engage pourtant le devenir de la société humaine.
L’Eglise de Rome n’a en effet pas soufflé mot sur le risque de dérive
totalitaire du Système que le scandale PRISM a mis en lumière.
Les réflexes pavloviens semblent donc avoir la vie dure au Vatican,
décidément trop habitué à faire profil bas devant les puissants.
Dieu reconnaîtra les siens.
The Show must go on
Et pendant ce temps-là, juché sur son risible prix Nobel de la Paix,
Barak Obama défend quant à lui bec et ongles l’établissement du
«goulag électronique globalisé».
Fin juillet, il a été jusqu’à mettre
son veto
à des auditions anti-NSA devant la Chambre des représentants. Bref, le
bonhomme tente de verrouiller le débat quelques jours seulement après
qu’une loi anti-NSA ait été
rejetée de justesse
au Congrès.
Mais le boulet n’est pas passé loin.
Et pour mieux enfoncer le clou, quoi de mieux qu’une bonne vieille
alerte terroriste globale.
Du gros et du lourd on vous le dit, avec fermetures de consulats et
d’ambassades sur tous les points chauds de la planète
of course. D’ailleurs, on a
même la transcription de
l’email intercepté par la NSA
et qui a mis le feu aux poudres… Du lourd on vous dit. De quoi
convaincre certainement tous les récalcitrants que, bien sûr, le
«goulag électronique globalisé»
est plus que jamais
nécessaire et vertueux
pour sauver notre indépassable way
of life.
Le truc est tellement énorme qu’on en rirait presque, si l’on n’avait
pas à craindre une éventuelle opération sous
false-flag, avec hélas de
vrais morts à la clé, pour crédibiliser la farce.
Post scriptum I, Hiroshima for
ever
Hors la farce justement, le 6 août marque un terrible anniversaire. Il y
a 68 ans jour pour jour, alors que le Japon était à genoux, les
Etats-Unis ont ordonné sans justifications militaires le largage d’une
bombe atomique sur la ville d’Hiroshima.
L’explosion est programmée à 600 mètres du sol pour produire le maximum
de destruction possible. La
bombe explose à la verticale d’un hôpital.
75 000 civils, femmes et enfants compris, sont instantanément
carbonisés. Dans les semaines qui suivent, plus de 50 000 personnes
trouvent la mort. Le nombre total de victimes s‘élèvent finalement à
environ 250 000.
Trois jours après Hiroshima, c’est au tour de Nagasaki d’être
sauvagement martyrisée par le feu nucléaire étasunien avec 40 000 morts
supplémentaires à la clé.
Victoire.
A l’heure de notre alerte terroriste globale à grand spectacle, nos
pensées vont donc aux victimes civiles et non-combattantes des deux
pires attaques terroristes jamais survenues dans l’Histoire.
Post scriptum II, espoir pour la Syrie ?
Durant deux ans, le Bloc atlantiste a mandaté le Qatar pour gérer la
logistique et le financement de la guerre menée contre le régime de
Damas. Mais devant l’incapacité de Doha à faire chuter Bachar el-Assad
ou même à marquer des points décisifs malgré les dizaines de milliers de
morts, les Américains ont viré l’émirat du dossier pour refiler la
patate chaude à Riyad.
Résultat, l’homme des américains dans le Royaume saoudien, Bandar ben
Sultan himself, est désormais
en charge du dossier. Or ce dernier vient de rendre une
visite assez inattendue
à Vladimir Poutine.
De là à imaginer qu’une deal entre Washington et Moscou est à l’étude
sur le dossier syrien, il n’y a qu’un pas.
Et devinez qui se retrouverait alors couillon ?
Un indice : ça commence par U et ça finit par E.