De l’ingratitude de la gueusaille en voie de développement

07/12/2011 Outrage ! Ingratitude ! Pensez-donc, toute cette incompréhension ! Alors que le Bloc occidentaliste, matrice de notre vertueux Système, s’échine à libérer les peuples du joug des tyrans pour les incorporer dans notre merveilleux Macdo-Monde-Libre (1), la gueusaille en voie de développement n’a de cesse de lui tourner le dos à la première occasion.
Jugez plutôt. Malgré les tapis de bombes humanitaires ou/et les océans de dollars déversés dans les poches des partis pro-occidentaux via de vertueuses ONG, ce sont partout des courants hostiles à l’idéologie du Système qui triomphent dans les urnes du monde pas encore libre. Outrage ! Ingratitude !

Même à Moscou
En Tunisie, au Maroc, en Egypte, les partis d’inspiration musulmane ont remporté haut la main tous les derniers scrutins. Un élan qui obéit à la fois à une forte revendication en termes de justice sociale bien sûr, mais aussi à une réaffirmation identitaire claire, nette et sans appel face à la nauséabonde tentative généralisée d’aliénation occidentale.
Même à Moscou, les partis d’opposition pro-occidentaux, pourtant noyés sous des fleuves de soutien atlantiste sonnant et trébuchant, n’ont pas le moins du monde réussi la moindre percée.
Bien sûr, les bobos de la presse-Pravda se sont empressés de confondre le recul du Parti de Poutine, Russie Unie, avec une hypothétique montée en puissance des opposants pro-occidentaux dans une vrille intellectuelle auto-congratulatrice. Et bien sûr, pour attester de cette thèse foireuse, ils ont donné un large, un immense écho à la répression d’une manif d’opposants qui a suivi le vote à Moscou, répression qui s’est toutefois soldée par un nombre d’arrestations bien en-deçà de celui réalisé par les vertueuses forces de l’ordre anglo-saxonnes contre les opposants d’Occupy Wall Street ces derniers jours. Mais qu’importe, il est bien connu que là-bas on embastille les agitateurs pour étouffer et réprimer, ici pour faire respecter la loi.
En réalité, le recul de Russie Unie correspond à un report de voix– essentiellement dû à l’usure du pouvoir à cause de la longévité du règne de Poutine et consorts –, sur d’autres partis dominants qui partagent, grosso modo, l’essentiel du programme… de Russie Unie. Mais en aucun cas en faveur de partis d’opposition émergents. Cette votation a été tout au contraire un plébiscite pour les courants politiques dominants de la Douma, dont Russie Unie reste le fer de lance (2).
En résumé, le vote Russe, dans la foulée des votes tunisiens, marocains ou égyptiens, s’inscrit dans un rejet massif et en voie de généralisation du modèle occidental.
Outrage ! Ingratitude !

En attendant la Syrie
Or malgré ces claques répétées (sans parler de la débandade irakiennes ou du fiasco afghan en cours), le Bloc atlantiste s’acharne aujourd’hui à provoquer l’effondrement de la Syrie pour ouvrir une brèche dans cet autre axe de résistance que constituent l’Iran, la Syrie donc, le Liban et la Palestine au Moyen-Orient.
Pour les stratèges éclairés du Bloc, casser la Syrie – sous couvert bien sûr d’un vertueux élan pour la Grande Liberté Cosmique – et y installer un pouvoir favorable à US-raël, c’est couper les vivres au Hezbollah libanais, affaiblir le Hamas palestinien et porter un coup sévère aux capacités de riposte de l’Iran. Le calcul est simple, simpliste en fait, mais on fait avec ce qu’on a.
Or il est clair que si l’opération devait aboutir, ce serait soit la guerre civile, soit le triomphe des islamistes dès l’ouverture des bureaux de vote, avec la confirmation d’un énième rejet du modèle occidental, bref, une nouvelle balle dans le pied du Bloc atlantiste.
Ô ingratitude !

Blocage russe et bruits de bottes
Pour l’heure, le grand délire militaro-néocolonialiste du Bloc, emporté par la mécanique de déchaînement de la matière du Système, se heurte au niet d’une Russie plus russe que jamais, et qui refuse de s’agenouiller en renonçant à son influence dans les derniers pays du Moyen-Orient où elle pèse encore.
La Russie a tracé une ligne rouge, soutenue sur ce dossier par la Chine et les pays du Brics notamment. D’où les jeux de guerre qui agitent en ce moment la Méditerranée et dont nous avons parlé dans notre dernière brève. Et désormais, les réseaux d’information de l’entité sioniste nous annonce même la guerre régionale tant attendue et si souvent annoncée depuis 5 ans, et cela dans les prochaines semaines, fidèles en cela à ce désir aussi morbide que constant qui les caractérise de vouloir enfin affronter la fin du monde.

L’Europe embedded
De son côté, l’Europe, embedded dans le binôme du Bloc atlantiste par la couardise de ses élites, s’enfonce joyeusement dans sa servitude suicidaire.
On le sait, si le petit Nicolas avait fait 15 centimètres de plus, le destin de la France, et donc de l’Europe, en aurait été changé. Non que ce nain politique aurait pu soudainement être à la hauteur de sa fonction et de l’Histoire – on n’a l’âme qu’on a–, mais il n’aurait peut-être pas cherché à compenser en politique, laissant la place à d’autres qui se seraient éventuellement montrés moins serviles. D’autres qui aurait peut-être fini par comprendre qu’il était temps pour l’Europe de s’émanciper, de tourner la page de la servitude et du mirage hollywoodien, de se tourner précisément vers l’Eurasie vers laquelle les portent naturellement et son Histoire et sa géographie. Et briser cet enchaînement mortifère à la contre-civilisation contemporaine commandée par Washington.
Mais bon, une fois encore, on fait avec ce qu’on a. Et l’éclatement final de la bulle de la dette US (ici dans le détail) et mondiale (ici seulement la dette publique), attendu ces prochain mois, précipitera sans doute les choses.
Mais pour l’heure, même sous le feu d’une guerre économique fratricide lancée par le parrain américain soi-même pour masquer sa propre banqueroute, l’Europe continue de ramper sans même tirer sur sa laisse, rêvant de pouvoir participer au grand festin final après la grande victoire finale tant attendue de Disney World.
La fidélité est une noble et belle chose lorsqu’elle est librement consentie à quelque chose ou quelqu’un qui en est digne.
Elle n’est souvent hélas que le signe tragique de la faiblesse, de la petitesse et/ou de l’égarement.
Pour l’Europe, le grand festin final pourrait dès lors ne pas être aussi copieux qu’espéré.

Techno-postface
En guise de dessert à ce menu du jour, on ne résiste pas à la tentation de vous donner quelques nouvelles du drone RQ-170, fleuron du technologisme du Bloc atlantiste, mais néanmoins abîmé en terres hérétiques.
Il semble désormais que le drone en question ne se soit pas écrasé en Iran pour cause de pause-déjeuner de son pilote, mais qu’il ait bel et bien été électroniquement «capturé» par les Iraniens. Cela grâce à un système de brouillage électronique russe de dernière génération baptisé Avtobaza. Version confirmée d’ailleurs par Debkafiles.
On se souvient d’ailleurs qu’en octobre dernier, un virus très efficace avait infecté les systèmes de guidage d’autres drones US, et l’on ne peut s’empêcher de penser que, là encore, les Iraniens pourraient bien avoir été au clavier. Sorte de riposte à l’attaque de leurs centrifugeuses par le virus US-raélien Stuxnet il y a quelques mois.
Quoi qu’il en soit, la «capture» du drone US résonne comme un avertissement de Téhéran qui fait ainsi la preuve de ses nouvelles capacités anti-aériennes. Démonstration hautement dissuasive pour un Bloc atlantiste dont la machine de guerre ne repose plus que sur les capacités technologiques de ses machines volantes justement.
De quoi freiner peut-être quelques ardeurs…


(1)
Dans l'essai intitulé L'Islam, l'Occident et l'avenir, Toynbee observe que «la civilisation occidentale ne vise à rien moins qu'à l'incorporation de toute l'humanité en une grande société unique, et au contrôle de tout ce que, sur terre, sur mer et dans l'air, l'humanité peut exploiter grâce à la technique occidentale moderne ». Il relève aussi que «la rencontre contemporaine entre l'Islam et l'Occident (…) ne constitue qu'un incident dans une entreprise de l'homme occidental pour “occidentaliser” le monde.» 
(2) Russie Unie : 238 députés; Parti Communiste : 92 députés; Russie Juste : 64 députés; LDPR : 56 députés.

PS: le reportage bidouillé de trop? Si vous avez, vous aussi, été particulièrement mal à l'aise devant la prestation de Laroche-Joubert au TJ, avec un reportage et un curieux plaidoyer sonnant aussi bizarrement faux l'un que l'autre, un commentaire posté sur le site du Figaro par celui qui semble être l'ancien Consul de France à Alep, Candide Soci, offre peut-être une explication à votre malaise...