Israël : des murs, des guerres et la crise

03/05/2012 Malgré 60 ans de soutiens financier, politique, idéologique et militaire de la part du Bloc atlantiste, le greffon israélien n’a jamais pris dans l’écorce du monde arabe et, soyons clairs, ne prendra jamais. Convaincue que seules la force et la violence peuvent lui assurer un minimum de longévité, l’entité sioniste n’a donc jamais eu qu’une seule stratégie hormis le vol des terres palestiniennes : organiser la division, la dévastation et la ruine autour d’elle pour prospérer dans l’œil du cyclone. Son agenda se résume donc pour l’essentiel à l’occupation sanglante de la Palestine, à la construction de murs et à la guerre. A la faveur de la crise générale du Système, un fait nouveau apparaît pourtant : le projet d’attaque de l’Iran provoque un affrontement musclé entre paranos et réalistes au cœur de l’administration sioniste. Et l’extrême tension qui prévaut aujourd’hui sur cette question semble indiquer que nous sommes peut-être arrivés à la veille de la décision finale.

Les murs, autour du champ de ruines intérieur
D’un point de vue psychiatrique on le sait: la violence faite à l’autre est à la fois le fruit et l’origine de pathologies diverses. En prenant un peu de hauteur, Kant résumait la chose à sa manière en disant que «l'inhumanité infligée à l'autre détruit l'humanité en moi». Et force est de constater qu’après 60 ans de violence faite à l’autre, d’inhumanité infligée à l’autre, Israël est aujourd’hui profondément enfermée dans une pathologie de type maniaco-dépressive, pathologie qu’encourage et entretient sa dramatique impunité sur la scène internationale.
Sous prétexte de protection, Israël n’en finit plus dès lors de construire des murs autour de son champ de ruines intérieur.
Jamais, dans l’Histoire, un régime n’avait ainsi érigé autour de lui autant de barrières, de barricades et de murs en si peu de temps. Après le mur high tech qui fait de Gaza la plus grande prison à ciel ouvert de la planète ; après le mur de la honte qui a permis le
vol supplémentaire de terres palestiniennes en Cisjordanie ; après le mur en cours d’édification à sa frontière avec l’Egypte, l’entité sioniste vient donc de débuter la construction d’un nouveau mur, à la frontière sud du Liban cette fois. Un énième mur serait d’ailleurs planifié à la frontière syrienne. Bref, la bunkerisation au pas de charge de l’entité sioniste bat son plein.
En Palestine, une blague circule disant qu’à termes au moins, l’Etat hébreu se sera lui-même totalement emprisonné et qu’il suffira alors de jeter la clé…
Plus sérieusement, ce besoin irrépressible et pervers d’enfermer le monde extérieur dans de gigantesques prisons témoigne d’une dégradation de plus en plus profonde de l’équilibre de la psyché collective israélienne.
D’ailleurs, comment pourrait-il en être autrement lorsque toute l’énergie vitale du pays s’épuise depuis 60 ans dans la haine et le massacre de l’autre. Comment pourrait-il en être autrement dans un pays qui transmet en héritage à toutes ses générations cette haine et cette obligation de massacrer l’autre comme la normalité de leur existence.
Dans ce contexte dramatique, la construction de murs pourrait même être interprétée d’un point de vue psychiatrique comme un acte manqué par lequel l’entité sioniste s’enfoncerait dans une logique d’exclusion et de réclusion d’elle-même, sous le masque de la prétendue exclusion des autres.
Aujourd’hui, la terre promise charrie donc des fleuves de sang et d’inhumanité dans une inculpabilité qui est, elle aussi, le symptôme sûr d’une pathologie à l’œuvre.
Or les chiffres de  l’immigration se tassent, alors que le nombre des juifs qui émigrent hors d’Israël
prend l’ascenseur, laissant penser que l’étouffement commence malgré tout à gagner la population.

La guerre, contrariée par la crise
Sur le front de la dévastation organisée, les deux dernières décennies ont été pleinement exploitées, avec plus ou moins de réussite toutefois. Côté réussite, l’écrasement et l’éclatement de l’Irak se sont déroulés à merveille,
comme prévu. Au Liban, l’entité sioniste a largement contribué au chaos durant une guerre faussement présentée comme civile, et si l’armée sioniste a pris une sévère raclée en 2006 contre le Hezbollah, les destructions opérées au Pays du Cèdre ont tout de même permis d’ajouter au désordre local et de ralentir l’essor économique du pays (1). Au Soudan, l’éclatement souhaité du pays a réussi et, en Syrie, l’affaire suit son cours.
Reste le projet de guerre contre Téhéran qui, au-delà de la fable absolument dérisoire de la menace nucléaire iranienne, est surtout perçu comme le dernier rival potentiel de l’entité sioniste dans la région.
Et le temps presse. Car une fois Glamour-BHO réélu, Israël aura perdu pour longtemps toute possibilité de forcer l’administration US à l’épauler dans sa ratonnade.
L’agitation est donc à son comble dans l’entité sioniste depuis quelques mois. En février, le secrétaire à la Défense US , Leon Panetta, avertissait ainsi qu’Israël pourrait attaquer l’Iran en
avril, mai ou juin.
De son côté, le site Debkafile, proche des faucons israéliens, stigmatise
les manœuvres des uns et des autres sur le terrain, évoquant le déploiement de F-22 Raptors dans le Golfe comme une renaissance des intentions belliqueuses américaines alors même que, depuis des mois, l’administration US, étranglée par la crise et épuisée sur tous ses théâtres d’opérations militaires, fait tout pour dissuader son encombrant allié de lancer cette énième guerre (concernant les F-22, on se pose aussi de sérieuses questions sur les réelles capacités opérationnelles de cette quincaillerie).

A la veille de la décision
Bref, les tenants de l’assaut final contre Téhéran, parano-Bibi et parano-Barak pour ne pas les nommer, tentent désespérément de produire l’étincelle nécessaire à la guerre tant espérée.
Pourtant, fait nouveau : la crise générale du Système a mis au jour une fracture au sein de la direction de l’entité sioniste entre les fous, qui pensent qu’une guerre US-raélienne contre l’Iran les aidera à asseoir définitivement la domination israélienne sur la région, et les réalistes qui, y compris au sein de l’appareil militaire israélien, freinent des quatre fers, car convaincus du potentiel catastrophique de cette confrontation pour l’entité sioniste.
Et en effet, une telle guerre pourrait bien être de nature à précipiter la chute d’un l’Empire US déclinant, une chute qui entraînera inéluctablement celle de l’entité sioniste dans son sanglant sillage. Comme le relevait Thomas Naylor, leader des néo-sécessionnistes du Vermont : «Il y a  trois ou quatre scénarios possibles pour conduire l’empire à l’effondrement, et l’un d’eux est une guerre contre l’Iran » («There are three or four possible scenarios that will bring down the empire. One possibility is a war with Iran»).
Aujourd’hui, l’extrême tension qui prévaut autour de cette question en Israël semble indiquer que nous sommes peut-être à la veille de la décision finale sur cette question.

(1) L'équipée sanglante déclenchée au Liban par l'Etat hébreu le 12 juillet 2006 a provoqué les pires dégâts économiques de son histoire contemporaine, pires que ceux générés en quinze ans de guerre (1975-1990). Hormis l’aéroport international, les centaines de ponts, de routes, d’autoroutes et de ports détruits par les bombes israéliennes, des dizaines d'usines et manufactures ont été visées. Dont Lecico, la plus importante entreprise de… sanitaires, et Liban-Lait, grande usine de produits laitiers (on a su par après qu’il s’agissait d’éliminer dans ce cas un concurrent aux entreprises israéliennes pour la fourniture de produits laitiers aux contingents de  la Finul  ). A ce tableau viennent évidemment s'ajouter les centaines de commerces et d'infrastructures touchés ou détruits par l'Etat hébreu, laissant des milliers de patrons et d'employés sur le carreau, et privant pour longtemps le pays de la confiance des investisseurs.