humeur : de la mal-information au militantisme

16/03/2012 En quelques années, la plupart des grands médias occidentaux ont tourné le dos à leur mission journalistique première. Après une décennie d’auto-formatage aux thèses du choc des civilisations et de la vertueuse suprématie occidentale, la presse-Système ne se contente plus de mal-informer, elle milite carrément, à coups de pétitions si nécessaires, dégoulinantes de bonnes intentions cela va sans dire, faisant des émules jusque dans les torchons de boulevard les plus reculés qui, eux aussi, veulent en être.
Les cas libyen et syrien notamment sont à cet égard devenus des cas d’école de cette nouvelle ère où la manipulation idéologique de l’information s’opère en mode automatique.
La vérification des informations ; la multiplication et le recoupement des sources ; la séparation des faits et du commentaire sont oubliées au profit de la recherche effrénée d’une simple confirmation du catéchisme ambiant.

Vacarme monocorde
Ne reste alors que la bruyante affirmation d’une vérité toute faite, inscrite dans l’exact prolongement du discours étatique, de la vertueuse narrative du Système donc, qui occupe l’entier de l’espace informationnel et tue ainsi dans l’œuf toute possibilité de remise en question de la «vérité révélée», c'est-à-dire imposée. Et dans ce vacarme monocorde, les voix dissonantes résonnent comme des fausses notes.
Hérauts de cette immense mystification, les reporters de guerre ne montent eux-mêmes plus au front pour vérifier ou témoigner, mais pour instruire à charge, pour attester de la validité de leur catéchisme donc, pour militer.

De l’Irak à la Syrie
Dire
que les Irakiens vivaient mieux avant l’intervention occidentale est ainsi une réalité incontestable, mais une réalité interdite d’antenne sous peine d’excommunication.
Dire que la destruction de la Libye a été justifiée par des montages et des mensonges et qu’il est hautement probable qu’à terme le pays connaîtra
l’éclatement sanglant
de l’Irak est également une réalité, mais une réalité elle aussi interdite de prime time.
Dire que la fixation hystérique des Occidentaux sur la dérisoire affaire du nucléaire iranien n’est qu’une vaste connerie destinée à figer artificiellement la tension au profit de l’entité sioniste – qui peut ainsi mettre les bouchées doubles dans le viol de la Palestine–, est encore une réalité, mais une réalité écrasée sous le poids de la désinformation justement.
Dire enfin qu’en Syrie, la légitime contestation populaire du début a été militarisée et détournée par le Bloc occidental, au profit d’extrémistes qui vont plonger le pays dans une sanglante guerre civile une fois le pouvoir conquis, est également une réalité, mais une réalité elle aussi interdite d’antenne.

De la Pravda à la presse-Système
Comme tous les bons petits soldats du monde, les journalistes embedded de la presse-Système sont convaincus d’être du bon côté et, en l’espèce, d’exercer leur libre-arbitre lorsqu’ils inondent la média-sphère de leur narrative militante.
Mais dans le meilleur des cas, toute cette diarrhée médiatique n’est que le fruit de leur paresse, de leur ignorance ou de leur conformisme et, dans le pire, celui de leur conviction absolue dans le catéchisme ambiant, c'est-à-dire le fruit de leur aveuglement complet.
A l’époque de la guerre froide, on riait beaucoup des fonctionnaires de la Pravda et de l’énormité des ficelles de leur propagande d’Etat.
Mais eux au moins savaient qu’ils mentaient.

Au citoyen de trier
Evidemment, tout ceci contribue à alimenter la mécanique d’autodestruction du Système puisque le fossé ne cesse de se creuser entre les peuples d’une part, et le Système flanqué de sa machine de communication d’autre part. En ce sens, comme nous l’écrivions dans une précédente brève, «l'effondrement de la crédibilité de la presse-Système fait très logiquement écho à celui des dirigeants de ce même Système».
A charge du citoyen de faire le tri désormais, de chercher les bons réseaux d’information et de ne lire la presse-Système que d’un «derrière distrait», histoire de mesurer l’état d’avancement de la maladie.
Pour le reste, les sources d’informations «dissidentes» ne manquent pas, qu’il s’agisse de la situation économique réelle du Bloc, de la Syrie ou du dessous des cartes de la «ripouxblique bananière» de Sarkozy par exemple (une liste non-exhaustive de ces sources vous est d’ailleurs proposée sur la page principale d’entrefilets.com (colonne de gauche).

>>Lire aussi notre autre brève du jour : «Syrie : Les grosses ficelles de l’intox».