Tambours de guerre et apoptose
12/10/2012 Il y a quelque
chose de fascinant à voir cette montée aux extrêmes généralisée sur tous
les fronts où s’agite le Bloc atlantiste. Partout où le canon n’a pas
encore «entamé son rouge labeur»,
la guerre est sur toutes les lèvres, dans tous les cœurs, dans tous les
esprits, à la fois crainte et désirée.
Sur le front Syrien, la
fièvre turque est venue ajouter au sanglant chaos orchestré par les
machinations occidentales.
Même
l’Irak commence
à s’en irriter. Déjà techniquement en guerre contre Damas, Ankara vient
même de franchir une étape supplémentaire en allant jusqu’à
provoquer Moscou,
principal allié de Bachar el-Assad.
De son côté, le Bloc occidental commence à
déployer ses propres troupes
à la frontière jordanienne. Quant à l’entité sioniste, elle confirme au
détour d’une interview que l’océan de sang organisé en Syrie ne vise
bien évidemment qu’à
affaiblir l’Iran.
Sur ce front-là, aucune trace de diplomatie, aucune volonté de dialogue,
juste la montée aux extrêmes.
Sur le front iranien,
l’entité sioniste n’en finit plus de tirer des plans sur la comète,
concoctant avec son allié étasunien
plan de guerre
après
plan de bataille
contre l’Iran. On reparle même d’une
«arme secrète»
que pourrait utiliser Israël à cette occasion.
De son côté, le Hezbollah libanais vient de reconnaître qu’il était
l’expéditeur du drone
qui a survolé des sites sensibles israéliens durant 30 interminables
minutes avant d’être intercepté. Un drone de fabrication iranienne et
assemblé par des ingénieurs de la milice, ce qui en dit long sur ses
nouvelles dotations. Mais cet épisode nous dit surtout
qu’en cas d’attaque de l’Iran
par Israël, l’ouverture d’un front nord avec le Liban est garantie.
L’Iran bombe lui aussi le torse, et averti qu’une
attaque préventive
de l’entité sioniste n’est plus exclue si Téhéran constate qu’Israël est
«sur le point de passer à
l’offensive». L’Iran confirme aussi qu’en cas de guerre,
les contingents US
stationnés dans le Golfe et en Afghanistan seront pris pour cible.
Sur ce front-là non plus, aucune trace de diplomatie, aucune volonté de
dialogue, juste la montée aux extrêmes.
Sur le front russe. Oui, il
peut paraître surprenant de parler de «front russe» plus de vingt ans
après la fin officielle de la Guerre Froide… et pourtant. Dès avant la
réélection de Vladimir Poutine, le Bloc occidental s’est lancé dans une
campagne d’agression soft
inédite confinant rapidement à l’hystérie. L’affrontement s’est
désormais cristallisé autour de la crise syrienne suite aux
deux vetos
russo-chinois imposés au bellicisme occidental, avec des implications
qui dépassent désormais de loin la simple mésentente. Aujourd’hui, il
n’est donc plus vraiment exagéré de parler de nouvelle guerre froide
entre les anciens ennemis. La Russie et la Chine ne comptent en effet
pas céder leur contrôle de la Méditerranée orientale, et le bras de fer
se durcit de jour en jour. Récemment, Moscou et Bagdad ont aussi annoncé
un contrat d’armement portant sur plus de
4 milliards de dollars,
ce qui semble ajouter l’Irak au nombre des amis de la Russie, d’autant
plus qu’un rapprochement entre Bagdad
(désormais gouvernée par les
chiites) et Téhéran s’organise en coulisses.
Bref, sur ce front-là encore, aucune trace de diplomatie, aucune volonté
de dialogue, juste la montée aux extrêmes.
Apoptose civilisationnelle?
Or sur ces trois fronts (et
il y en a d’autres), c’est l’hystérie occidentale, et plus
singulièrement
israélo-étasunienne, qui est le facteur déclenchant et aggravant des
crises.
Ce qui nous renvoie à notre conviction que les élites aux commandes du
vaisseau atlantiste sont désormais sur pilote automatique, encagées
qu’elles sont dans la logique belliqueuse d’un Système qu’elles ne
gouvernent plus,
dans aucun domaine.
Les postures idéologiques, les slogans hystériques et les machinations
sans fin ont ainsi
remplacé la politique et l’on voit mal, dans ces conditions, ce qui
pourrait empêcher les canons
d’entamer encore et encore «leur
rouge labeur».
Reste à savoir à quelle échelle.
Or dans l'état de banqueroute généralisée dans lequel se trouve le Bloc
atlantiste, une nouvelle guerre, a plus forte raison si elle est de
grande ampleur, pourraît bien se révéler suicidaire pour lui dans un
processus d'auto-destruction finalement assez logique.
Récemment, un ami (merci Charles) attirait ainsi mon attention
sur le phénomène de l'"apoptose"
ou "mort cellulaire programmée", qui décrit le mécanisme à l'oeuvre dans
une cellule qui entame son autodestruction dès lors qu'elle reçoit des
messages chimiques signalant la mort inévitable de l'organe auquel elle
appartient.
De l'Elysée à la Maison-Blanche en passant par Downing
Street, les principales cellules du Système seraient-elles emportées par
ce syndrome, comprenant intuitivement que leur machine infernale est
arrivée en bout de course?
Arnold J. Toynbee, illustre philosophe de l'histoire, nous avait
prévenus : "Les civilisations ne meurent pas assassinées, elles se
suicident."
Dont acte.