De Kiev à Damas, une même folie
23/09/2014 On sentait évidemment le coup venir depuis des semaines.
Destinées à émouvoir la ménagère de plus de 50 ans et le militant de
base de l’UMPS mondial, les fausses décapitations de citoyens US (1)
puaient en effet le casus belli à plein nez. Stopper la barbarie de
l’EI/Daech par des frappes forcément chirurgicales en Irak et en Syrie?
Vaste plaisanterie quand nombre de pays de la coalition montée à la hâte
par Washington, pour se la jouer
«communauté internationale», figurent parmi ses principaux bailleurs
de fonds. Vaste fumisterie lorsque sous prétexte de sauver des minorités
dont on favorise le martyre depuis des années, on cherche surtout à
achever la trop résistante légalité syrienne pour affaiblir la Russie et
permettre au Bloc atlantiste de conserver son hégémonie mondiale.
Un instrument aussi
Daech ou EI, ou ISIS comme on veut, c’est d’abord le résultat de la
deuxième guerre d’Irak et de la dissolution de l’armée de Saddam par le
proconsul américain Bremer. Une opération accessoirement lancée elle
aussi sans l’aval de l’ONU; elle aussi avec une coalition de bouffons et
de petits pays clients à qui on a tordu les bras.
Daech ou EI, ou ISIS comme on veut, c’est ensuite le financement et
l’armement durant trois ans de groupuscules terroristes en Syrie sous
couvert de pseudo révolution. Et cela sous les acclamations de
l’Occident américanisé et de sa machine de propagande bien huilée.
Daech ou EI, ou ISIS comme on veut, c’est enfin, idéologiquement
parlant, le résultat de 100 ans de délire wahhabite saoudien. Cette
Arabie saoudite si cher au cœur de notre Bloc atlantiste, dépendance à
l’or noir oblige, et pourtant matrice idéologique de ce terrorisme
sunnite contre lequel on prétend se défendre.
Mais Daech ou EI, ou ISIS comme on veut, et la franchise al-Qaïda
avant lui, c’est aussi un instrument pour le Système atlantiste.
Car dans la version ultime de la terreur pseudo-islamiste
(2) qui nous est proposée aujourd’hui, l’horreur atteint un tel
degré qu’elle permet désormais toutes les guerres, toutes les frappes,
tous les assassinats et toutes les opérations de
regime change rêvées par le
Système atlantiste, et cela au mépris de la légalité internationale et
de la souveraineté des nations.
Car avec ce cynisme affolant et cette inculpabilité qui sont aussi sa
marque de fabrique, ce Système, bien que totalement dépassé par
l’ampleur soudaine du monstre qu’il a contribué à créer, cherche tout de
même à tirer profit de la situation.
Un Grand Jeu contre le BRICs
Ce n’est donc pas un hasard si on a largement traîné les pieds en
attendant les premiers succès concrets de Daech sur le terrain.
Ce n’est donc pas un hasard si des frappes d’une ampleur sans précédent
sont désormais menées en Syrie, un an presque jour pour jour après une
première tentative avortée (3)
de lancer une guerre dans ce pays.
Ce n’est donc pas un hasard si, au premier jour de ces frappes, Israël,
qui devrait pourtant craindre le pire de Daech, a jugé bon d’abattre
un avion
de chasse syrien qui opérait justement contre la nébuleuse terroriste.
L’idée folle derrière cette vertueuse campagne atlantiste est
probablement d’y voir l’opportunité d’accélérer l’effondrement du régime
de Damas dans l’espoir d’une recomposition favorable au Système
atlantiste. Une recomposition qui permettrait de casser l’axe
Iran-Syrie (4) et d’infliger ainsi un sérieux revers à la Russie qui pourrait
perdre le contrôle de sa base maritime de Tartous.
Et c’est là que s’opère la jonction entre l’Ukraine et Daech, dans le
Grand Jeu du Système américaniste pour casser la Russie, et ce faisant,
pour contrer la montée en puissance des pays du BRICs (5).
«Guerre contre le terrorisme 2.0»
Enfin, accessoirement, l’avènement de ce nouveau fléau, et la
«guerre perpétuelle contre le
terrorisme 2.0» qu’il impose, va nécessairement favoriser
l’avènement du totalitarisme que nous redoutions en 2012 déjà dans notre
essai «De la bataille contre le Système» (6). Déjà, la censure d’internet est en marche (7),
ne reste plus qu’à attendre les inévitables attentats qui vont survenir
ici et là au cœur du Bloc, et sa riposte en matière de restriction des
libertés.
Dans sa folle entreprise pour
«persévérer dans son être» et maintenir son hégémonie, le Système
atlantiste a ainsi allumé partout des incendies qu’il ne contrôle plus.
Des incendies qui vont chaque jour le contraindre à se pervertir
lui-même un peu plus, jusqu’à renier et invertir toutes les valeurs
qu’il prétend défendre et dont il se réclame.
Jusqu’à la tyrannie ou l’effondrement.
(1) Sur
les fausses décapitations
(même
les grands merdias
ont dû en parler)
(2) Hassan
Nasrallah, sur la nature de Daech
(3) Première
tentative avortée de guerre contre la Syrie
(4) Sur
l’axe Iran-Syrie
(5)
Enfumage ukrainien : contre propagande
(6) De
la bataille contre le Système
(7)
La censure d’internet votée en France