Ahmadinejad, le bouffon libérateur

22/04/09 Quelle belle unanimité dans le conformisme! Vive la pensée unique! Dans la presse occidentale, la presque totalité des commentateurs a donc condamné, la plupart du temps sans réserve aucune, les propos "scandaleux" tenus par le président iranien lundi à Genève à l'occasion de l'ouverture de la conférence de suivi contre le racisme, dite Durban II. Mais qu'a donc dit de si sulfureux Ahmadinejad? Voyons un peu: "Israël a un gouvernement raciste". Difficile de soutenir le contraire après 60 ans de régime d'apartheid et de massacres à l'encontre des populations arabes et palestiniennes en particulier. "Après la seconde guerre mondiale, ils [les alliés] ont eu recours à l'agression militaire pour priver de terres une nation entière. Ils ont envoyé des migrants d'Europe, des Etats-Unis et d'autres endroits du monde pour établir un gouvernement raciste en Palestine occupé." Bien que le raccourci soit critiquable dans sa forme, il est difficile là encore de donner tort au président iranien si l'on a l'élémentaire honnêteté intellectuelle d'admettre que la perception d'un événement historique est avant tout affaire de culture et de position. "Le Conseil de sécurité de l'ONU a soutenu le gouvernement oppresseur d'Israël et l'a défendu pendant des années en laissant libres ces criminels. Et plusieurs gouvernements occidentaux, dont l'administration américaine, ont défendu ces porteurs d'une politique raciste..." Ahmadinejad ne fait pas dans la langue de bois certes, mais c'est le seul reproche que l'on peut faire à ce dernier énoncé.
Alors qu'est-ce-qui ulcère à ce point nos chers commentateurs? A vrai dire rien. La virulence et l'unanimité de la réaction traduisent non pas l'exercice d'une pensée libre, mais un simple réflexe pavlovien à l'échelle continentale. Le terrorisme intellectuel organisé par l'intelligentsia, les organisations israéliennes et leurs relais a ainsi depuis longtemps chloroformé toute autonomie de la réflexion sur la question juive dans le microcosme politico-médiatique occidental. Ayant personnellement travaillé plus de dix ans au sein de la rédaction d'un grand quotidien suisse, je peux d'ailleurs témoigner de l'intensité des pressions exercées sur les journalistes et en particulier sur les chefs de rubrique étrangère en fonction de l'importance de l'actualité. Et je peux vous assurer qu'il faut une grande force pour résister à ces manoeuvres, le seul soupçon d'antisémitisme étant très difficile, sinon impossible à vivre pour un journaliste agréé.
Au final, le postulat de base de tout exercice rédactionnel est donc devenu, en gros, que, Shoah oblige (eh oui, toujours...), quelque soit l'ampleur, la durée, la multiplication, la gratuité et la sauvagerie des crimes israéliens, l'Etat hébreu doit être excusé et défendu contre les barbares musulmans qui rêvent tous, au moins en secret, de le "rayer de la carte". Israël peut donc massacrer autant de civils qu'il veut, femmes et enfants compris (cf Liban 2006, Gaza 2009), Israël peut torturer, déporter, enfermer, affamer et priver de soins des populations entières dans des camps entourés de barbelés et de miradors, Israël peut expérimenter sur elles ses nouvelles armes et celles de ses alliés, peut emprisonner et exécuter arbitrairement, peut établir un régime d'apartheid dont la dureté fait rétrospectivement passer les Afrikaners pour d'aimables plaisantins, Israël a été, doit rester et restera toujours, toujours et encore, la victime, le peuple élu luttant pour sa survie.
Alors oui! Ahmadinejad, bouffon libérateur d'au moins oser dire la vérité sur cet Etat voyou, et ce devant un parterre de délégués européens forcément ulcérés (ah, Pavlov!) que l'on puisse s'exprimer librement à une tribune de l'ONU. 
Allez! Rassurons un peu. Sûr qu'Ahmadinejad n'est tout de même pas un saint et que son régime collectionne les crimes contre les droits de l'homme. Mais, hurlons-le, certainement pas plus qu'Israël. A moins de considérer que ce que l'Etat hébreu inflige depuis 60 ans aux Palestiniens et aux Arabes israéliens ne doit pas être pris en compte. Si c'est le cas, alors il faut bien admettre que faire l'économie du soupçon d'antisémitisme impose une bonne dose de racisme.
Laissez donc le mot de la fin de ce petit coup de gueule à Ben Gourion, ancien premier ministre israélien, cité par Nahum Goldmann dans “Le Paradoxe Juif”, page 121: « Si j’étais un leader arabe, je ne signerais jamais un accord avec Israël. C’est normal; nous avons pris leur pays. Il est vrai que Dieu nous l’a promis, mais comment cela pourrait-il les concerner ? Notre dieu n’est pas le leur. Il y a eu l'antisémitisme, les Nazis, Hitler, Auschwitz, mais était-ce leur faute ? Ils ne voient qu’une seule chose : nous sommes venus et nous avons volé leurs terres. Pourquoi devraient-ils accepter cela ? »
Je n'ose imaginer la réaction des commentateurs agréés si Ahmadinejad avait dit cela.... 
L'hypothèse d'une disloquation des Etats-Unis, suite...  Dans notre brève du 24 mars dernier (ci-dessous) nous évoquions l'hypothèse d'une disloquation des Etats-Unis à la faveur d'un effondrement économique (dont ici les dernières nouvelles concoctées par le LEAP. Voici un repérage intéressant de dedefensa.org qui signale que lors d'une réunion politique au Texas, on n'a pas hésité à parler sécession: "On découvre d’une façon convaincante, ou bien l’on en a confirmation, que le sujet ainsi débattu en général, qui n’est rien de moins que l’éclatement des USA, est un sujet très sérieux, très actuel, qui constitue secrètement un des grands thèmes importants des réflexions dans les USA en crise. Il est manifeste que l’éclatement est non seulement le stade ultime d’une crise grave aux USA, mais aussi le stade ultime naturel, sinon évident, d’une telle crise grave. La fragilité structurelle des USA, à laquelle nous croyons énormément, est ainsi mise en évidence." >>Lire le texte et ses liens