fin février 2007

La déstabilisation du Liban,
un élément-clé de la stratégie des néocons américains
dans leur grand projet de remodelage du Moyen-Orient


Dans la Bêkaa, les ponts détruits n'ont pas encore été reconstruits.

A l'entrée de la Bêkaa, ce pont a été détruit en plusieurs raids par l'aviation israélienne. Il est toujours impraticable.

Situé près de Hadeth, à l'est de Beyrouth, ce pont dont la re construction vient d'être entamée ne représentait aucun objectif militaire (ci-dessus et en bas).

 


Et dans les environs de Beyrouth, ce sont toujours les ponts militaires de l'ONU qui permettent de circuler...

Brève remaniée le 20 mars.

Dans un long article publié sur le réseau Voltaire le 3 janvier 2007, Jürgen Cain Külbel, ancien enquêteur de la police criminelle de Rda (1974-1988), journaliste indépendant et écrivain, décrit par le menu détail comment le couple israélo-américain à planifié puis déclenché sa guerre contre le Liban à l'été 2006, guerre qui s'inscrivait dans le plan néocons américains pour un remodelage du Moyen-Orient, les deux derniers verrous à faire sauter, après avoir renvoyé l'Irak à l'âge de pierre, étant l'Iran et la Syrie comme chacun sait. Et pour en finir avec le fable d'une réaction à l'enlèvement de deux soldats israéliens par le Hezbollah, qu'il suffise une fois pour toute de rappeler que l'opération militaire israélienne n'a connu aucune graduation dans la violence et que, donc, elle ne visait pas à faire monter la pression pour obtenir la libération des deux soldats en question. Non. Ce qui a été observé au plan militaire fut le déclenchement d'une campagne de frappes aériennes massives dans une guerre immédiatement portée à son paroxysme, sans l'ombre d'un processus d'escalade militaire dont chaque pallier est censé, dans ce type de situation, permettre la négociation avec la partie adverse. La guerre israélienne a été une guerre totale, une guerre de destruction dont les objectifs étaient multiples.

- Au plan militaire, il s'agissait de provoquer l'exode massif des populations chiites du Liban-Sud vers la capitale, d'où l'intensité inimaginable des frappes dans cette région, avec organisation planifiée de massacres de civils (comme la pseudo-bavure de Cana, lire ci-dessous la brève du 8 août donnant les conclusions de HRW) pour faire fuir les plus hésitants, et l'usage massif de bombes à sous munitions destinées à empêcher ensuite le retour des déplacés. Les Etats-majors étasuniens et israéliens avaient estimé que les déplacés chiites allaient se heurter à des blocus, à l'hostilité des populations chrétiennes, mais aussi sunnites, ce qui devait immanquablement déclencher des heurts. Parallèlement, des groupes d'anciens miliciens avaient été préparés, dans les zones chrétiennes notamment, à cette situation avec mission d'alimenter ces troubles, de les faire dégénérer en affrontements sanglants.
C'est que le retour du chaos au Liban offre plusieurs avantages du point de vue étasunien. Totalement incapable d'appréhender la complexité de la situation libanaise, Washington en est encore à considérer le Hezbollah comme une légion iranienne parachutée au Liban. Et cela sans mesurer le moins du monde que ce parti a, au fil des ans, gagné en autonomie face à Téhéran et
se veut aujourd'hui un parti politique libanais à part entière, patriotique d'abord, même s'il garde pour lui le flambeau de la résistance face à l'agresseur sioniste. Mais pour les Etasuniens qui ont l'Iran dans leur collimateur, s'attaquer aux Hezbollah revient à couper l'une des tentacules que Téhéran est supposé pouvoir actionner en cas d'attaque américaine. Par ailleurs, un chaos au Liban pourrait servir de porte d'entrée locale aux Américains, avec toutes les facilités accordées par l'équipe en place aux GI, dans la perspective d'une éventuelle guerre régionale qui pourrait aussi impliquer la Syrie. Téhéran et Damas étant les deux derniers verrous à faire sauter suivant la stratégie des néocons étasuniens pour un "remodelage du Moyen-Orient". 
Au Liban pourtant, la manoeuvre a pour l'instant échoué. Tant du côté du général Aoun que du chef du Hezbollah Hassan Nasrallah, le plan étasunien avait été anticipé et des informations et consignes très strictes ont été diffusées de par et d'autres pour éviter tous débordements. Au final, c'est l'inverse de ce qui était prévu qui a été observé avec un réflexe de solidarité nationale face à l'agression israélienne et un accueil généreux des déplacés chiites dans les régions épargnées par le pilonnage israélien.. Le Hezbollah en est aussi ressorti considérablement renforcé politiquement du fait de sa résistance héroïque face à l'ampleur de l'attaque israélienne.
Malgré l'échec de cette tentative de déstabilisation, la situation reste très tendue à Beyrouth. Les récents attentats contre des bus de civils à Bikfaya, qui ont fait une douzaine de morts en région chrétienne, étaient une autre manoeuvre destinée à mettre le feu aux poudres, les commanditaires ayant tenté de faire croire que le coup venait de l'opposition réunissant principalement le courant aouniste et le Hezbollah.
Des bruits insistants circulent aussi sur d'éventuelles livraisons d'arme à la milice de Samir Geagea par Israël et, plus généralement, d'autres milices semblent aussi se réarmer. Dimanche 25 février, dans son homélie, le Patriarche Sfeir a d'ailleurs déclaré qu'au Liban "toutes les parties se réarment". Dans l'Hebdo Magazine no 2571 du 16 février, page 8, on pouvait lire: "Un rapport, émanant de certains services de renseignements européens, indique que l’atten-tion des forces de sécurité européennes a été attirée, en début d’année, par le volume des transac-tions d’armes qui auraient été conclues par des partis libanais de tout bord. La course à l’armement semblerait donc bien partie. Les commandes, selon ce rapport, portent sur des fusils de haute précision, des missiles sol-sol de courte portée et de petites dimensions, des jumelles à vision nocturne, des mines de forte puissance explosive... La plupart de ces marchés passent par des trafiquants d’armes ou des sociétés commerciales, libanaises, arabes et européennes. Nous-voilà rassurés sur notre avenir!". Mais aussi cette nouvelle, disparue de la version online du site aujourd'hui:  "La nouvelle formule du Futur. Le député Saad Hariri et ses conseillers ont réussi à accomplir une avancé de taille, dans la mise en place d’une structure regroupant partisans et sympathisants du Courant du futur. Des conseil composés de 24 membres représentatifs des divers secteurs d’activités ont, ainsi, été créés dans les mohafazats (médecins, ingénieurs, pharmaciens, étudiants et notables...).La nouvelle formule prévoit également, à la suite des suggestions émanant des cadres du Mustaqbal dans les régions, de dissocier le rôle du député de celui du parti. Le conseil central des dé-putés, qui a été institué, sera donc indépendant de la structure mise en place. La source du Courant du futur, qui rapporte toutes ces informations, reconnaît l’attribution d’une fonction à l’ex-islamiste Kanaan Naji et à l’officier dissident pendant la guerre civile, Ahmed el-Khatib, chargés tous deux des questions sécuritaires. Kanaan Naji aurait déjà mobilisé quelques 200 palestiniens qui ont créé l’organisation Fateh el-islam après s’être séparé du mouvement Fateh-Intifada dans le camp palestinien de Nahr al-Bared, en décembre passé."

- Au plan économique, la guerre israélienne visait aussi de briser le Liban en tant que rival économique régional. En ce sens la stratégie de l'Etat hébreu peut se lire à travers l'image météorologique de l'ouragan, Israël étant bien entendu  l'oeil du cyclone, calme et tranquille, épargné, alors qu'autour de lui les pays sont périodiquement ravagés par la désolation et renvoyé à l'âge de pierre, ce qui permet à l'Etat hébreu de rester le principal pôle économique régional. En 22 jours d'offensive, le Liban a ainsi subi les pires dégâts économiques de son histoire contemporaine, pires que ceux générés en quinze ans de guerre (1975-1990). Au moins une centaine de ponts, de routes et d’autoroutes ont été détruits par les bombes israéliennes. L’aéroport international de Beyrouth ainsi que le port de la capitale, de même que ceux de Jounieh et Tripoli, ont subi d'importants dégâts. Des dizaines d'usines et manufactures ont été visées dont Lecico, la plus importante entreprise de sanitaires, et Liban-Lait, grande usine de produits laitiers. "Les Israéliens ont décidé coûte que coûte de garder une avance de 5 à 10 ans sur les pays qui l'entourent, et lorsqu'ils voient surgir un rival potentiel, il l'élimine par la guerre si besoin", résumait à Beyrouth un haut responsable libanais. Si quelques Libanais avaient encore des illusions à ce sujet, poursuivait notre interlocuteur, l'ampleur des destructions provoquées par Israël leur a fait comprendre la vraie nature de ce pays et le sentiment qu'il nourrit à notre égard".

 

relire Nos brèves au fil des jours durant l'attaque israélienne

L'attaque du Liban comme répétition générale (ratée) de l'attaque de l'Iran 18/08/2006 La conviction du journaliste américain de renom Seymour Hersh (>>2) est que l'attaque du Hezbollah par Israël devait notamment être une sorte de répétition générale de l'attaque étasunienne en préparation contre l'Iran. Les américano-israéliens ne percevant, dans leur logique manichéenne, le Hezbollah que comme une simple extension des forces armées iraniennes avec les mêmes techniques de combat, le même type de bunkers qu'il faut s'attendre à trouver en Iran etc... Les stratèges du pilonnage aveugle et criminel du Liban, façon "choc et effroi" en Irak, pensaient aussi que plus il y aurait de destructions et de morts, plus il y aurait de déplacés, plus l’opinion public libanaise se retournerait contre le Hezbollah. Un modèle idéal qui, appliqué ensuite à l'Iran, devait sans doute permettre un éventuel renversement de régime de l'intérieur. De defensa.org  estime qu'avec cette lecture des événements, Hersh apporte "une contribution essentielle à l’éclairage et à la compréhension évidente de la signification du conflit. Israël ayant agi comme un “proxy” et Washington ayant manipulé l’action de ce pays contre le Hezbollah, tout cela dans le but de préparer une attaque contre l’Iran". Et même si l'opération israélienne s'est soldée par l'échec total que l'on sait -- avec un Hezbollah qui ressort renforcé et plus soutenu que jamais de la confrontation --, "ce n’est en rien un argument valable pour les esprits échauffés qui tiennent le haut du pavé à Washington", assène de defensa. Et de citer aussi les sombres pronostics d'un Patrick J. Buchanan persuadé que l'équipe Bush poussera sa logique destructrice à son terme: «With our War Party discredited by the failed policies it cheered on in Lebanon and Iraq, there will come a clamor that Bush must “go to the source” of all our difficulty – Iran.»
Le fiasco étasunien au Moyen-Orient est pourtant si énorme, si fabuleux, si abyssal avec un Irak en pleine guerre civile, un Afghanistan ravagé, un Liban désormais dévasté, que l'on cherche à se persuader que, tout de même, les Etats-Unis ne peuvent plus se permettre de s'enfoncer encore, de rompre les dernières amarres qui les lient encore à la "civilisation", considérés qu'ils sont désormais par tous, enfin tous les peuples s'entend, comme le principal fauteur de guerre de la planète. Mais c'est oublier que le déni de réalité est devenu la règle à Washington où les neocons rêvent toujours de leur moment, de la grande conflagration finale qui les remettra sur pied, qui leur donnera enfin raison. Car la psychologie américaniste impose à ses acteurs la fuite en avant comme seul moyen de justifier ce qui a été fait auparavant, sans se remettre en question ni admettre ses erreurs, à plus forte raison ses crimesAvec des conservateurs en passe de perdre leur double majorité en novembre, et qui n'ont pour tout programme que leur pseudo-guerre contre le terrorisme, nous vivons donc à l'évidence des temps où tout devient possible, surtout le pire. Conscient de la menace qui se précise, l’Iran a d'ailleurs décidé de débuter samedi une série de grandes
manœuvres militaires dans tout le pays, censées se poursuivre "pour une durée non-précisée".
L'espoir d'éviter ce pire existe toutefois, tant l'échec de la politique moyen-orientale du cabinet Bush est manifeste
. Jeudi, une vingtaine d’anciens diplomates et militaires étasuniens ont ainsi appelé, dans une lettre ouverte, Doobleyou à entamer immédiatement des négociations avec l’Iran. Une lettre qui vient s’ajouter au concert de critiques d’anciens responsables gouvernementaux, aussi bien républicains que démocrates, sur la stratégie désastreuse de l’administration Bush au Moyen-Orient. Ancien ambassadeur des Etats-Unis à l’ONU, Richard Holbrooke a déclaré que "les seuls bénéficiaires de ce chaos sont l’Iran, le Hezbollah, Al-Qaïda et le leader chiite irakien Moqtada Sadr." Et d'ajouter: "Cette combinaison d’éléments inflammables pose la plus grande menace pour la stabilité mondiale depuis la crise des missiles à Cuba en 1962".
Jusqu'à Londres,  on commence enfin à s'interroger...
Espoirs donc. 
No comment Extrait verbatim d'une interview entre un journaliste et un jeune porte-parole de l'armée israélienne, diffusée sur une chaîne satellite arabe après la mort de 12 soldats israéliens tués par le Hezbollah le 6 août, au 26e jour de l'attaque du Liban, et dont nous trouvons la trace sur un site égyptien.
- Le journaliste - Comment la mort de ces soldats va-t-elle affecter vos plans?
- Le porte-parole - Vous avez vu ce massacre de 12 Israéliens... Cela va...
- Vous dites massacre? Mais il s'agissait de soldats et c'est la guerre?
-
Non, c'était un massacre parce que les gens qui ont tiré ces missiles ne visaient pas des soldats. Ils visaient des civils israéliens mais ont tué des soldats par accident.
- Mais vous avez aussi commis des massacres à Cana (où 38 civils ont été tués dont 11 enfants) et ailleurs...
- Non, il n'y a pas eu de massacre à Cana. Ce sont des combattants du Hezbollah qui étaient la cible du bombardement mais les civils ont été tués par accident.

- Un temps de tous les dangers 15/08/2006 Israël a donc perdu sa guerre contre le Hezbollah malgré les dévastations et les boucheries perpétrées un mois durant au Pays du Cèdre. Mais l'Etat-major israélien le sait-il? Et, si oui, va-t-il accepter de voir sa capacité dissuasive réduite à néant après sa défaite face à une simple milice? Quant aux commanditaires étasuniens de cette "proxy war", comment ont-ils lu les événements? Eux qui persistent à penser qu'ils ont gagné en Irak malgré le fiasco évident de leur aventure mésopotamienne, ne vont-ils pas finalement estimer, suivant le même raisonnement inversé, que l'opération israélienne est un début de succès et qu'il convient d'encourager l'Etat hébreu à pousser le fer plus loin dans la plaie, histoire de créer les conditions-cadre à une guerre contre l'Iran et la Syrie, la grande guerre finale toujours au programme des néocons (>>1 /// >>2); cela bien sûr après une réévaluation de la stratégie israélienne à l'abri du cessez-le-feu onusien? Autant de questions qui rendent très pessimistes certains observateurs sur la suite des événements, à commencer par Robert Fisk qui va jusqu'à affirmer que la "vraie guerre va commencer" maintenant.
Quant à Doobleyou, il semble toujours dangereusement obsédé par l'Iran et la Syrie qu'il accuse de tous les maux, Téhéran et Damas étant les deux derniers verrous que les néocons rêvent de faire sauter dans leur grand
projet de remodelage à coup de flingue du Moyen-Orient. Lundi soir, il s'est lancé dans une inquiétante diatribe contre l'Iran et la Syrie, affirmant que "le régime iranien fournit au Hezbollah de l’argent, des armes et entraîne les combattants de l’organisation. A quelques jours de l’échéance d’un ultimatum lancé par le Conseil de sécurité à la République islamique pour qu’elle renonce à l'enrichissement d'uranium, Doobleyou s'est empressé de clamer que "l’Iran a signifié clairement qu’il veut la destruction d’Israël. Nous ne pouvons qu’imaginer quels dangers bien plus grands ferait courir ce conflit si l’Iran avait l’arme nucléaire comme il en a la volonté". A l'adresse de Damas, il a déclaré que "la Syrie est un autre Etat à soutenir le Hezbollah. La Syrie permet aux armes iraniennes de traverser son territoire en direction du Liban. La Syrie permet aux dirigeants du Hezbollah d’opérer de Damas et apporte son soutien politique à la cause du Hezbollah."
Même si le pire n'est jamais garanti, rien se semble donc joué malgré le cessez-le-feu onusien. Il faut espérer que l'armée libanaise se déploie le plus vite possible au Sud et que le Hezbollah renonce à en découdre, et désarme, malgré les horreurs infligées par l'Etat hébreu au Pays des Cèdre. C'est le seul moyen de couper l'herbe sous le pied des fous de guerre israélo-étasuniens.

- une cinquième semaine de carnage autorisée 10/08/2006 Encouragé par les atermoiements de la "communauté internationale", l'Etat voyou israélien est sur le point de lancer une vaste offensive terrestre au Liban où il entame une cinquième semaine de carnages et de destructions. Mis en échec par la résistance désormais jugée "héroïque" du Hezbollah, Tel Aviv poursuit dans sa fuite en avant par une escalade verticale des opérations, tapant toujours plus fort, avec toujours moins de discernement, espérant sans doute que le vacarme des bombes et les hurlements des victimes innocentes masqueront l'enlisement d'une armée israélienne qui a perdu tous ses repaires moraux, une armée de coupe-jarrets qui ne respecte aucune des lois élémentaires de la guerre, une armée sans honneur.
Paris s'éveille Et pendant que le sang libanais coule une nouvelle fois à flot, le Conseil de sécurité repousse de loin en loin l'adoption d'une résolution demandant l'arrêt du massacre, paralysé qu'il est par Washington dont le seul objectif est, à l'évidence, de donner le plus de temps possible à son allié israélien pour atteindre les objectifs d'une guerre qu'il lui a sous-traitée.  Mais Paris commence à hausser le ton et menace de proposer son propre texte. Le désaccord entre Paris et Washington porte essentiellement sur les conséquences à tirer de la décision du gouvernement libanais de déployer 15'000 soldats au Liban Sud, ce qui permettrait de mettre immédiatement un terme aux carnages israéliens. La Russie soutient elle aussi ce projet. Le gouvernement français, qui a qualifié cette décision d’"initiative majeure", souhaite que le texte de la résolution en tire "des conséquences concrètes" mais les Etats-Unis temporisent.  Jacques Chirac a déclaré mercredi que renoncer à un "cessez-le-feu immédiat" serait "immoral", et prévenu que la France pourrait déposer sa propre résolution.

- Crimes de guerre 08/08/2006 Une équipe d'enquêteurs de l'Organisation de défense de droits de l'homme Human Right Watch a parcouru le Liban depuis le début de la guerre. Dans Le Monde du dimanche 6 et lundi 7 août, elle affirme: "Nos conclusions sont très claires: Israël n'établit aucune distinction entre les civils et les objectifs militaires. C'est une violation grave des lois de la guerre." En parlant du massacre de Cana, ou 28 personnes ont été tuées et 13 autres portées disparues après le bombardement de leur immeuble, Human Right Watch raconte: "Les Israéliens ont d'abord dit que les combattants du Hezbollah étaient à l'intérieur du bâtiment et que des roquettes ont été tirées. Puis qu'il y avait eu une erreur de tir de 300 mètres. Puis ils ont renoncé à ces explications dans leur déclaration finale. Pourquoi? Parce-qu'ils mentaient dès le début comme ils le font toujours (...). Nous avons sillonné le village [de Cana]. Il n'y avait strictement rien [qui prouvait que des missiles ont été tirés]. Cana n'est qu'un exemple parmi plusieurs autres de tirs sur des maisons abritant des familles, dont certaines ont été décimées." Human Right Watch affirme aussi détenir des preuves d'utilisation, par l'Etat hébreu, de bombes à fragmentations, notamment "dans le village frontalier de Blida". Et de conclure en disant: "Presque toutes les victimes ont été tuées par des bombes de précision que les Etats-Unis continuent de fournir à Israël".
Nouveau bras de fer franco-américain en vue? La première mouture du projet de résolution de l'ONU, dit franco-libanais, vaut son pesant de petits massacres. Ainsi, s'il demande "un arrêt complet des hostilités", il exige surtout du Hezbollah de cesser "toute attaque" et  ne demande, à Israël, que de renoncer aux attaques "offensives". Une formule qui n’interdit donc pas à l’armée israélienne de mener toutes les opérations qu'elle voudra pour peu qu'elle les qualifie de "défensives", selon sa propre appréciation bien sûr. Autres exemples: le projet de résolution ne fixe pas de calendrier pour le retrait des troupes israéliennes qui occupent à nouveau le Liban Sud et, en ce qui concerne le problème des prisonniers, le texte demande la "libération inconditionnelle" des deux soldats israéliens capturés par le Hezbollah, mais se contente d’encourager les efforts "visant à régler la question" des prisonniers libanais détenus par l’Etat hébreu. Le déséquilibre du texte est si énorme, si fabuleux, qu'on le croirait dicté par l'Etat hébreu lui-même. C'est presque vrai tant on y reconnaît la patte de Washington dans son soutien inconditionnel à Tel Aviv, à plus forte raison pour une guerre dont nombre d'observateurs estiment aujourd'hui qu'elle a tout bonnement été sous-traitée à Israël par le cabinet Bush (lire ci-contre: Hyptohèses de guerre).
Reste que la France fait là son come back diplomatique. Ami historique du Liban, Paris a, dit-on, bataillé ferme des semaines durant pour modérer un texte dont on ose à peine imaginer la formule initiale voulue par les Etats-Unis et Israël. Et le bras de fer n'est pas terminé. D'aucuns y voient déjà les prémices d'un nouvel affrontement diplomatique transatlantique. A suivre donc...
A ce jour, au moins 938 civils ont été massacrés par l'armée israélienne au Liban, dont 30% d’enfants de moins de 12 ans, ainsi que 30 militaires et gendarmes. S’y ajoutent 53 combattants du Hezbollah. Il y a 3400 blessés. Du côté de l'agresseur israélien, 36 civils ont été tués par les roquettes du Hezbollah sur le nord d’Israël depuis le 12 juillet et 59 militaires israéliens ont été tués.

- MiSe en échec par le Hezbollah, Israël choisit la fuite en avant 04/08/2006 C'est un fait militaire indéniable, l'armée israélienne est incapable ni de briser la résistance du Hezbollah ni de contenir ses ripostes. Alors que les civils libanais périssaient hier écrasés par les nouveaux bombardements de l'Etat hébreu, le Hezbollah a riposté avec le tir de quelques 130 roquettes en une heure, tuant lui aussi des civils Israéliens. La réponse envisagée par Tel Aviv pour masquer son enlisement naissant au Pays du Cèdre: encore plus de bombardements sur Beyrouth, où la zone de frappe des bombardiers israéliens vient d'être étendue à trois quartiers supplémentaires, et une probable occupation du Liban Sud jusqu'au fleuve Litani.
Au plan politique, le chef du Courant patriotique libre, le général Michel Aoun, a martelé qu'il "ne voulait pas de forces étrangères au Liban", à propos des projets d'envoi d'une force internationale d'interposition au Liban Sud. "Cette force ne stabilisera rien du tout. Elle va au contraire déclencher une nouvelle guerre. Ce sera une force d’occupation pour faire la guerre au Hezbollah et pour assurer la sécurité d’Israël". Michel Aoun estime aussi qu’un "cessez-le-feu suffit. Nous pouvons garantir son respect. Il faut que les Israéliens acceptent un processus de négociations". Le chef du Courant patriotique libre réclame "la création d’un tribunal international qui jugera les responsables israéliens des crimes de guerre commis contre ces centaines de Libanais morts sous leurs bombes".
Un mot aussi sur la tactique militaire israélienne. Sans présumer des buts réels de l'Etat hébreu dans cette nouvelle équipée sanglante (lire ci-dessous: Hypothèses de guerre), on peut constater que le déroulement de l'offensive israélienne au Liban semble calquée sur le modèle américain en Irak: une débauche de technologie d'abord mise au service de frappes aériennes et d'artillerie massives (selon la technique dite "choc et effroi" du Pentagone), et une assez inattendue, il faut le dire, incompétence au sol. L'armée israélienne paraît s'être, en quelque-sorte, "américanisée", avec les conséquences que l'on sait et que l'on voit en terme de destructions et de massacres de civils. Et même au plan de la réflexion stratégique, des similitudes apparaissent. Alors que les Etats-Unis espéraient que l'invasion de l'Irak leur permettrait d'attirer un nombre qu'ils imaginaient limités de "terroristes", qu'ils auraient alors eu tout le loisir d'éliminer en fixant le combat hors des frontières nationales, Israël semble faire le même calcul en espérant créer une zone de guerre "extérieure" où les combattants du Hezbollah viendraient rapidement mourir jusqu'au dernier. Malgré l'effarante disproportion des forces en présence, on en vient tout de même à se demander, les mêmes causes produisant les mêmes effets, si le Liban Sud ne va pas devenir le bourbier de l'Etat hébreu. Mais à quel prix pour les Libanais!

toutes les vérités sont bonnes à dire Le 31 juillet dernier, le forum internet du Nouvel Obs consacré au Proche-Orient était animé par Paul Blanc, ambassadeur de France au Liban entre 1986 et 1988.
Voici quelques échanges arbitrairement sélectionnés avec des internautes:
- Israël ne devrait-elle pas être jugée au tribunal pénal international en regard de ses agissements vis à vis des peuples Palestiniens et Libanais?
- Il faut reconnaître que détruire un pays avec la volonté apparente de le faire disparaître de l’économie régionale, écraser sous les bombes des centaines de civils n’ayant aucun rapport avec la guerre, se comporter comme si la défense de la sécurité des citoyens passait avant la survie des peuples de la région ne fait pas honneur aux hommes qui ont perpétré ces actions, qu’ils soient les dirigeants ou les éxécutants. Sans doute, Isrëel n’a pas compris que la domination militaire totale sur la région du Proche-Orient qu’elle a acquise lui donnait un devoir de maîtrise de soi et de respect des obligations humanitaires, plutôt que de rendre encore plus difficile une négociation politique par une répression brutale, aveugle et inconsidérée.
- Pourquoi israël se permet en toute impunité le terrorisme d’Etat sous prétexte de sa sécurité... pour les autres, revendiquer des droits à un Etat, c’est du terrorisme!!!!
- Vous posez là la question majeure que devraient se poser les dirigeants d’Israël. Je résume très vite : Israël est né menacé d’être jeté à la mer et a tenu bon, après sa victoire de 1967. Il a pendant 24h en 1973 pu croire qu’il serait détruit par les attaques de ses voisins. Il a gagné et peu à peu est devenu de très loin la principale force du Proche-Orient. Toujours obsédé par sa défense et sa survie alors que personne n’était en mesure de l’ébranler il aurait dû changer d’attitude et, comme tous les plus forts, garder son sang froid. Au contraire il vient de donner la démonstration qu’il se croit toujours autorisé à tout faire même à tuer des enfants et des femmes ou à détruire un pays voisin pour assurer sa protection. Le meilleur service que peuvent lui rendre ses amis c’est de l’inviter à une conversion: quand on est le plus fort on se maîtrise et on respecte les principes humanitaires.
- La mansuétude et pour tout dire la lâcheté des pays occidentaux envers Israël est sans limites. Certes les pays européens portent encore la croix de la Shoah. Mais en raison de ce passé on accepte d’Israël à peu près tout y compris les actes barbares perpétrés aujourd’hui contre tout un peuple. Quand comprendra-t-on que dénoncer les crimes d’Israel ce n’est pas être antisémite!
- Il est exact que le comportement des descendants des victimes du plus grand crime raçiste de l’histoire seront jugés plus sévérement encore que d’autres quand ils commettent de sang froid les pires brutalités car ils insultent indirectement à la mémoire de leurs parents.

- Offensive terrestre en préparation 01/08/2006 Le pire est sur le point de survenir au Liban. La bride laissée sur le cou par la fameuse communauté internationale, l'Etat hébreu prépare une nouvelle invasion terrestre du Pays du Cèdre. Selon Radio Israël, trois divisions supplémentaires, soit près de 15'000 hommes, vont être mobilisées pour l'occasion. Objectif officiel: repousser le Hezbollah à 20km de la frontière israélienne. On l'a compris, la trêve aérienne décrétée Israël après le massacre de Cana, où 54 civils dont 37 enfants ont été tués, aura donc surtout permis un exode de population du Liban Sud bien utile à la vaste opération terrestre désormais prévue. Des milliers de Libanais ont en effet profité de l'accalmie pour fuir une région pilonnée depuis trois semaines par Israël.

- boucheries et objectifs multiples 30/07/2006 Une fois de plus, une fois encore au Liban, la barbarie israélienne a repoussé les limites de l'horreur. 54 civils ont été tués dans un bombardement à Cana, dont 37 enfants. La fameuse communauté internationale se prétend "horrifiée" et les prochains jours diront s'il ne s'agit-là que d'une gesticulation de plus. Quant au numéro trois de la diplomatie américaine, Nicholas Burns, il s'est empressé d'estimer que la tuerie de Cana "ne constituait pas un crime de guerre". Le premier ministre israélien, Ehud Olmert, s'est alors lui aussi empressé... d'exiger à son partenaire étasunien 12 à 14 jours de champs-libre supplémentaires pour achever cet effarant jeu de massacre et de destruction. Et qu'importe si, sur plus de 600 victimes des frappes de l'Etat hébreu depuis le 12 juillet, au moins 500 sont des civils innocents, chiffre qui ne tient évidemment pas compte de tous les morts enterrés dans leurs abris par les bombes israéliennes et que l'on ne découvrira qu'à la fin des "opérations".
C'est que les objectifs d'Israël sont légion:
- Désarmer par la force le Hezbollah pour faire cesser ses attaques est l'objectif affiché bien sûr. 
- Déstabilisation politique du Liban Mais le cantonner au statut de milice combattante est aussi un objectif israélien au moment où le retour amorcé du Parti de dieu dans le jeu politique libanais venait de connaître une étape spectaculaire avec la signature, en février dernier,  d'un «document d’entente» avec la formation aouniste, principale force de l'opposition. Un bémol tout de même à ce stade pour constater qu'au Liban, même si l'aventurisme militaire du Hezbollah reste critiqué, son taux de popularité est en train d'exploser au vu de la résistance considérée comme héroïque de ses combattants. Et quelle que soit l'issue l'issue de la confrontation, son poids politique au Liban n'en sortira que renforcé. C'est là, peut-être, une première erreur tactique de l'Etat hébreu dans son équipée sanglante.
- Guerre économique contre le Liban Parallèlement, certaines, la plupart en fait des cibles choisies par Israël -- ponts, routes, aéroport, infrastructures dans tout le pays --  n'ont que peu à voir avec le Hezbollah. C'est le Liban en tant qu'Etat que l'on vise ici, que l'on cherche à renvoyer à l'âge de la pierre, histoire de l'occuper à 15 ans de reconstructions supplémentaires. A l'heure actuelle, les dommages causés au Liban sont estimés à 750 millions d'euros par les économistes. 80% des routes principales ont été détruites. Il faut dire qu'un Liban en paix, reconstruit, stabilisé politiquement, fort et capable de rejouer son rôle séculaire de pont entre l'Occident et l'Orient est apparemment perçu comme une menace pour l'économie d'Israël.
- La tentation iranienne Enfin, comme nous l'avons dit dans une précédente brève, les boucheries perpétrées par Israël dans les Territoires palestiniens et au Liban font écho à celles perpétrées par les Etasuniens en Afghanistan et en Irak dans le cadre de leur grand dessein de remodelage du Moyen-Orient. L'appareil militaire israélien paraissant agir  ici comme une simple extension de celui de la Maison-Blanche pour frapper à un niveau plus local. Mais avec le risque de voir L'Etat hébreu jouer les alliés en rupture de ban et bombarder l'Iran, prétextant son soutien au Hezbollah. L'objectif  d'une telle opération étant, pour Israël, de compenser l'échec des Etats-Unis à enrôler le Conseil de Sécurité dans une ratonnade contre Téhéran. Ce serait bien sûr le scénario du pire, heureusement improbable tant la folie de l'équipée saute aux yeux. Mais au vu de ce à quoi l'on assiste et des alliances qui dominent l'échiquier, difficile d'écarter totalement l'hypothèse. 
- Aux dernières nouvelles, Israël a annoncé la suspension pour 48 heures des pilonnages aériens suite à l'émotion suscitée par le carnage de Cana, avec la promesse toutefois de reprendre l'offensive après ce délai. Pause dont Israël tire au passage un avantage non négligeable pour son projet de création d'une zone tampon de deux kilomètres à l'intérieur du Sud Liban. En effet, la première conséquence de cette trêve aérienne a été un exode des populations de cette région vers Beyrouth.

- Feu vert anglo-saxon à l'Etat-voyou israélien 28/07/2006 Au moins 406 morts, dont 340 civils! Tel est le monstrueux bilan des sanglantes opérations israéliennes sur le Liban depuis le 12 juillet dernier. L’Unicef juge de son côté «catastrophique» la situation dans le pays du Cèdre où près de 500'000 personnes ont été contraintes de prendre les routes de l’exode pour fuir les massacres perpétrés par l'armée israélienne. Malgré cela, les Etasuniens et leur caniche britannique n'en ont pas moins bloqué toute exigence de cessez-le-feu immédiat lors de la Conférence de Rome qui s'est dès lors bornée à annoncer qu'elle allait... "œuvrer en partenariat avec la communauté internationale pour apporter une aide humanitaire immédiate au peuple libanais". La plupart des autres pays à la conférence (Canada, Egypte, Allemagne, Chypre, la Grèce, Jordanie, Russie, Arabie Saoudite, Espagne et Turquie) demandaient en effet comme préalable l'arrêt des opérations militaires israéliennes. Bien évidemment, l'Etat hébreu a considéré qu'il s'agissait là d'un blanc seing et a officiellement annoncé qu'il allait intensifier ses carnages au Liban.
Et dire qu'il suffirait d'un embargo européen d'une semaine pour faire cesser ces tueries. Vous avez dit Europe?

- De BagDad à Beyrouth. jusqu'à téhéran? 27/07/2006 L'offensive lancée par Israël contre le Liban n'est évidemment pas une simple réaction défensive à l'enlèvement de deux soldats de Tsahal sur le territoire libanais par les miliciens du Hezbollah, le 12 juillet dernier, en vue d'un échange de prisonniers. En fait, les plans d'attaque de l'Etat hébreu étaient prêts et le casus belli attendu, espéré. C'est que, parallèlement aux massacres perpétrés à Gaza et en Cisjordanie depuis des semaines pour briser le Hamas et la résistance palestinienne, l'Etat hébreu a décidé d'ouvrir un deuxième front avec le Liban pour en finir avec le Hezbollah. L'objectif israélien étant la capitulation pure et simple de ses adversaires pour imposer sa "paix" sans jamais avoir à la négocier.
Israël veut sans doute tirer aussi un maximum d'avantages de l'appui inconditionnel que le cabinet Doobleyou lui offre depuis son investiture frauduleuse en 2001. Et le couple américano-israélien fonctionne si bien depuis lors que l'on pourrait même voir, dans les boucheries perpétrées par Israël dans les Territoires palestiniens et au Liban, une sorte de prolongement de celles perpétrées par les Etasuniens en Afghanistan et en Irak pour servir leur grand dessein de remodelage du Moyen-Orient . L'appareil militaire israélien devenant ici une simple extension de celui de la Maison-Blanche pour agir à un niveau plus local.
Reste à savoir jusqu'où ira cette escalade. Car alors que les Etats-Unis ont échoué à convaincre leurs partenaires du Conseil de Sécurité de faire plier l'Iran par la force, et que l'Etat hébreu accuse les mollahs de soutenir le Hezbollah, Israël pourrait être tenté de jouer les alliés en rupture de ban en lançant des frappes sur l'Iran d'ailleurs déjà planifiées. Un scénario certes catastrophe mais ce ne sont pas, pour l'heure en tout cas, les gesticulations de la fameuse "communauté internationale" qui lui feraient obstacle.
Un mot encore sur les incroyables destructions des infrastructures libanaises par Israël, qui sont autant de crimes de guerre qui ne trouvent qu'une explication rationnelle: la volonté de l'Etat hébreu de profiter de la situation, avec un cynisme effarant, pour renvoyer le Liban à l'âge de pierre et se maintenir comme principale pôle économique régional.
>> Réthorique et dialectique