assassinat d’hariri : le Tribunal enfin forcé d’examiner la piste interdite israélienne
13/07/2010 « A
qui profite le crime » est une question banale, certes. Elle n’en reste pas
moins centrale de par sa force logique et devrait donc obséder l’esprit de tout
enquêteur impartial. Or, dans le cas de l’assassinat du premier ministre
libanais Rafik Hariri, le 14 février 2005, la réponse à cette question aurait
toujours du placer Israël au premier rang des suspects. Pourtant les enquêteurs
officiels ont jusqu’ici rivaliser de mauvaise foi pour scrupuleusement
ignorer cette piste. Les récentes
révélations du Hezbollah risquent de rendre le déni un peu plus difficile
désormais.
La valse des suspects
Il faut dire que rarement assassinat n’aura été autant instrumentalisé. Dans
un premier temps, la commission d'enquête créée par l’ONU avait en effet conclu
à des «preuves
convergentes» mettant en
cause les Syriens. Mais comme nous le relevions dans
une récente brève,
il s’agissait alors pour Washington de chasser les Syriens hors du Liban pour
faire place nette avant l’attaque israélienne de 2006.
Selon certaines indiscrétions, le Tribunal Spécial pour le Liban, chargé
désormais d’élucider l’assassinat, s’apprête désormais quant à lui à mettre en
cause… le Hezbollah, nouvelle bête noire des « US-raéliens ». (Gageons
que si demain Tripoli devait faire quelque faux pas, de nouveaux indices
subitement découverts dirigeraient sans doute l’enquête du côté de la Libye...)
Repérages israéliens
Reste que pour l’heure, le secrétaire général du Hezbollah, Hassan
Nasrallah, vient de lancer une contre-offensive pour le moins dérangeante en
produisant des documents qui représentent, et c’est peu dire, un très sérieux
faisceau d’indices pouvant démontrer l’implication d’Israël, et donc
probablement des Etats-Unis, dans ce crime.
Hassan Nasrallah a en effet
diffusé lors d’une conférence de presse,
lundi 9 août dernier, des images vidéo d’une reconnaissance israéliennes du site
de l'assassinat de Rafic Hariri, prises avant le drame. Il a précisé qu'elles
avaient été prises par un avion de reconnaissance de type MK.
Les images montrent les routes proches du Parlement au centre-ville de Beyrouth,
de la résidence de Rafic Hariri ainsi que celle longeant le front de mer, près
duquel ce dernier avait été assassiné en 2005. D'autres images retracent
également le parcours de l'ancien Premier ministre jusqu'à sa résidence à Faqra,
avec une insistance particulière sur les tournants, propices à l'exécution d'un
assassinat, dans la mesure où le conducteur du véhicule est censé ralentir à ce
niveau.
Hassan Nasrallah a révélé que des drones et des avions de combats israéliens,
ainsi qu'un avion AWACS (qui sert à
superviser et à contrôler des opérations militaires), ont survolé le Liban
quelques heures avant l’assassinat de Hariri. Et des avions de chasse israéliens
ont survolé le lieu de l'assassinat la veille entre 20h43 à 23h50 locales. « Nous
avons également noté une « guerre électronique »
ainsi qu'une activité aérienne israélienne anormalement élevée le jour de
l'assassinat », a encore précisé le chef du Hezbollah.
Le dignitaire chiite n'a pas manqué de relever que la commission d'enquête
internationale, représentée par le procureur Daniel Bellemare, pourrait obtenir,
si elle le désirait, le plan retraçant les activités de ces drones et leurs
itinéraires «en les demandant à Israël ou
à un pays ami».
Vœu pieu s’il en est.
Mais au moins, les révélations de Nasrallah vont contraindre le TSL à se
pencher, enfin, sur la
piste interdite israélienne.