désordre à l'extérieur et fracture à l'intérieur

21/02/2013 Ces derniers temps, une nouvelle accélération semble saisir l’histoire du monde sous la pression de puissantes forces centrifuges. D’un côté, encagé dans sa posture belliciste, le Bloc atlantiste s’enfonce dans une logique de confrontation avec les grandes puissances rivales, au point que le spectre d’un affrontement avec la Russie ressurgit. De l’autre, les Etats-Unis eux-mêmes se retrouvent traversés par une fracture de plus en plus profonde entre Démocrates et Républicains, au point que le pays en devient pratiquement ingouvernable.
En août 2008 la Russie avait sifflé la fin de la partie en envoyant ses chars fumants et pétaradants occuper l’Ossétie du sud. Le «moment unipolaire» qui avait vu les Etats-Unis présider seuls et sans entraves à la destinée du monde était terminé. Il avait duré un peu plus de 18 ans. Dix-huit ans que l’Oncle Sam a tenté de mettre à profit pour avancer ses pions en Asie centrale et «convertir» le Moyen-Orient aux vertus de la dictature libérale, le tout à coups de flingue comme il se doit. Un million de morts plus tard (dans un
Irak éclaté et en guerre civile) ; quelques dizaines de milliers de morts supplémentaires plus tard (au Liban et dans un Afghanistan dévasté et toujours occupé), le monde redevenait multipolaire sous la poussée d’une Russie revenue aux affaires avec le soutien de la Chine, d’une partie de l’Amérique latine et de l’Afrique, ainsi que de l’Inde notamment.
Depuis, les relations entre le Bloc atlantiste (Les Etats-Unis flanqués de leurs laquais européens donc) et la Russie n’ont cessé de se détériorer jusqu’à une cristallisation sanglante dans le
conflit syrien.

Déséquilibre de la terreur
Aujourd’hui, les positions des deux grandes puissances semblent à ce point inconciliables que les hostilités gagnent désormais des domaines particulièrement sensibles, comme la question des arsenaux nucléaires. Ainsi, le Traité Start-III signé en 2010 – et sensé aboutir à une réduction substantielle et conjointe du nombre d’ogives détenus par les deux grandes puissances nucléaires–, pourrait bien être mort-né.
Le fait est que la réduction de l’arsenal à environ 1550 ogives nucléaires pour chaque pays pose désormais problème en raison du repositionnement des forces US en Asie et du développement parallèle de leur bouclier anti-missiles (BMD).
Car contrairement à ce qu’ânonne la narrative occidentale dans l’enfumage globalisé qui est le nôtre, le BMD n’est absolument pas destiné à protéger qui que ce soit d’une hypothétique menace iranienne, mais bien de contrer la puissance russe et éventuellement chinoise.
Dès lors, les capacités d’interception grandissantes du BMD américain, couplées à la proximité des rampes de lancement de missiles nucléaires US stationnées en Europe, modifient lentement mais sûrement les variables de l’équation.
Si le Traité Start-III devait être appliqué en l’état aujourd’hui, il donnerait ainsi un avantage stratégique certain aux USA en mettant clairement la Russie à la merci d’une attaque nucléaire de «première frappe» comportant d’excellentes chances de réussites (L’objectif étant dans ce cas la vitrification totale de l’adversaire au moment où les risques liés à sa capacité effective de riposte deviennent «acceptables»).
Les Russes sont donc en train de se dire que Start-III ressemble
de plus en plus à piège plutôt qu’à un Traité, soupçonnant le Pentagone –qui tire les ficelles derrière la potiche BHO– de tout simplement chercher à les rouler dans la farine.
En cas d’obstination des USA dans cette manœuvre désormais éventée, la Russie pourrait donc être contrainte à une
sortie unilatérale du Traité Start-III, avec relance de la production d’ogives à la clé, juste au cas où…
Encore une belle victoire du Bloc atlantiste en perspective.


Fracture étasunienne
Le poisson pourrit, comme on dit, par la tête.
Rien de plus normal donc que les Etats-Unis, matrice du Système qui constitue le gouvernail et le moteur de
notre Hyper-Titanic, heurtent en premier l’iceberg vers lequel ils nous conduisent avec tant d’assurance.
C’est que rien ne va plus dans le vertueux monde de Psycho-Mickey. Certes, les principales puissances économiques mondiales ont accepté de
pratiquer la respiration artificielle sur le cadavre économique étasunien en banqueroute, mais seulement parce que laisser les Etats-Unis sombrer implique forcément la soupe populaire pour tout le monde. Sauf que la banqueroute n’en est pas moins là, rampante, lancinante, patiente et dotée d’un potentiel centrifuge phénoménal.
Pour couronner le tout, l’hyper-puissance étasunienne est aussi menacée au plan intérieur.
Jamais, depuis la Guerre de sécession en effet, le pays n’a été aussi profondément divisé, fissuré, fracturé.
Avant la
réélection surprise de BHO, les Républicains étaient en effet certains, absolument convaincus au plus intime de leur être, que jamais Ô grand jamais, BHO n’allait être réélu. Depuis, ils ont cédé à la panique et leur seul objectif est désormais d’empêcher Obama de gouverner. Le récent blocage de la nomination de Hagel à la Défense par une improbable manœuvre est le dernier exemple en date de la rage haineuse qui habite désormais les Républicains à l’encontre d’Obama. Plus grave encore, cette fracture ouverte semble également traverser la population étasunienne où la division est si tranchée désormais que, selon les confidences d’amis américains, «on ne se parle parfois même plus dans des familles aux sensibilités politiques différentes».

Un président-assassin coupé de sa base
Quant au prix Nobel de la paix BHO, il a en plus réussi l’exploit de se couper d’une large partie de sa base en devenant le premier président étasunien à approuver officiellement
l’assassinat de citoyens US. Résultat : la division du camp démocrate lui-même est désormais entamée.
Rien ne va plus donc, dans le merveilleux monde de Mad-Mickey. Et la perspective d’un effondrement accéléré,
voire d’une dislocation des Etats-Unis, semble se préciser.
Le désordre qui mine le Système est donc complet, grandissant de jour en jour sous la poussée de forces centrifuges que rien ne semble pouvoir arrêter.
L’éclatement attendu de la bulle «dollar» alors que les grandes puissances se mesurent à couteaux tirés rend ainsi le désordre ambiant plus que jamais explosif pour notre vertueux Système.

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Post scriptum syrien
La
boucherie entretenue en Syrie par le Bloc atlantiste et ses alliés progressistes du Golfe est en passe d’échapper à tout contrôle. L’un des chefs de gangs locaux vient en effet de menacer d’attaquer le Liban, accusant le Hezbollah d’avoir bombardé des positions rebelles. Le potentiel de la crise syrienne en tant que détonateur d’une guerre régionale est désormais une réalité que ferait bien de prendre en compte les pyromanes atlantistes. Mais bien sûr, il n’en prenne pas le chemin
Pour attester du complet égarement du Bloc atlantiste dans les affaires arabes, rappelons au passage qu’il soutient à bout de bras le régime dictatorial de Bahrein en aidant à écraser la révolte populaire depuis deux ans.
Donc pour résumer, le Bloc aide les gentils islamistes en Syrie contre le méchant Bachar al-Assad; tente d’écraser les mêmes zozos au Mali et en Afghanistan car, là-bas, ce sont de méchants fanatiques radicaux, et fait tout pour sauver la gentille monarchie de Bahreïn de son méchant peuple en révolte.
Les voies de la vertu occidentale sont décidément impénétrables.

Post scriptum égyptien
Juste le repérage d’un excellent article qui éclaire la situation égyptienne.